L'Expression

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LA PETITE BIBLIOTHÈQUE DE L'ÉTÉ 2016 (X)

Donner du sens à la lecture

la lecture n'est pas seulement un refuge contre l'ignorance et la détestation de l'Autre soi-même: c'est surtout l'apprentissage de la liberté de penser juste.

Lire, sans doute, mais quoi? C'est, avant tout, lire selon l'apprentissage acquis auprès de nos enseignants qui eux-mêmes lisant impeccablement, nous communiquent leurs «bonheurs et profits» que leur apporte la lecture. Présentement, à notre âge, si nous ne lisions pas, l'ennui triturerait notre esprit et affaiblirait notre raison de vivre. Â quand, Les Assises du Livre et de la Lecture proposées, il y a bien longtemps, par «L'Association des Amis de la Rampe Louni Arezki» (Casbah-Alger)? En attendant, ouvrons nos bibliothèques, - que la lecture devienne une excellente tradition en classe, dans les cercles de lecture, dans les foyers, dans le bus, dans le train...et, bien sûr, lorsqu'on est membre du Jury d'un Prix littéraire!
Voici des extraits des présentations de quelques ouvrages de la saison 2015-2016 du Temps de lire.
YOKO ET LES GENS DU BARZAKH de Djamel Mati. Chihab Éditions, Alger, 2016, 363 pages: «Et si le Barzakh était notre vie ici-bas? [...] Comment le serait-il, sauf évidemment si, à la fiction, l'esprit humain mêle ses pieuses préoccupations les plus intimes sur sa propre vie dans une société en révolution et en proie à l'épreuve de l'indifférence, de la douleur et de l'absence de méditation. C'est ce que, à mon sens, Djamel Mati se propose de nous faire observer dans son nouveau roman Yoko et les gens du Barzakh (*). En outre, d'emblée en plein titre, il nous met sous les yeux ce mot «barzakh», si souvent usité en sciences islamiques. S'inspirant des informations puisées ailleurs, Djamel Mati note avec pertinence: «Sous un rapport linguistique, le Barzakh signifie barrière, isthme, limite séparant deux objets ou entités. Sur le plan religieux, il implique le monde intermédiaire entre la mort et la résurrection (Passage du défunt du monde des mortels à l'au-delà). Dans le Barzakh, il existe plusieurs étapes qui permettent à l'âme d'évoluer. Dans ce roman, l'auteur le suppose aussi comme étant un des états psychologiques qui devance l'ultime étape avant un accomplissement.» Réflexion tout à fait perspicace, car il fait appel au jugement d'une condition humaine, ici évoquée. [...]
Peut-être faudrait-il ajouter à l'intention du lecteur «avisé» ou «perplexe» que ce mot «barzakh», paraissant «étrange», proprement prononcé «barzakhoun», se trouve trois fois dans le Coran: Al-Mou'minoûna (Les Croyants), sourate XXIII, verset 100: «... Peut-être accomplirai-je quelque oeuvre pie, parmi ce que j'ai laissé! C'est là un mot qu'il dit et derrière eux est une barrière (barzakh) jusqu'au jour où ils seront rappelés», Al-Fourqân (La Salvation), sourate XXV, verset 53 et sourate LV, v. 20. Selon l'éminent orientaliste arabisant-français, Régis Blachère (1900-1973), professeur à la Sorbonne et traducteur du Coran, «Barzakhoun ´´barrière´´ est un mot iranien dont le sens est défini dans la sourate XXVII, verset 60, où ce terme est remplacé par le mot arabe hâdjizun qui a ce sens. Sur l'explication de ce passage, v. sourate XXV, 53.» Le voici: «C'est Lui qui a fait confluer les Deux Mers: celle-ci potable et douce, celle-là saumâtre et non potable, et entre elles deux Il a placé une barrière (barzakh) et une limite respectée.» Le professeur Blachère écrit en note à ce verset: «Les Deux Mers. Chez Tabari, cette expression est prise en un sens très étendu: Le Créateur a fait en sorte que la masse des eaux fluviales ne soit pas altérée par la salinité de l'eau de mer. Toutefois, pour la génération même de Mahomet, il est possible que ce passage ait fait penser au phénomène du non-mélange immédiat des eaux de l'Euphrate et du Tigre avec celles de la mer, à leur débouché dans le Golfe persique. En tout cas c'est l'interprétation retenue dans les commentaires postérieurs à Tabari.» [Tabari, historien et exégète du Coran, est né en 839 à Amol au Tabarestan, région ancienne d'Iran, et mort en 923 à Bagdad en Irak]. [...] Revenons à l'objet très intéressant de ce roman qui traite, en 11 chapitres et un épilogue, des événements douloureux que vit «l'émigration clandestine». D'entrée, nous avons le sentiment d'un immense amour ceint de pitié, de courage et d'indignation qui va courir page après page, et d'autant que «Certaines personnes sont comme les étoiles, leur lumière brille encore, pourtant elles sont mortes depuis longtemps», - si elles sont mortes... [...] Le livre algérien doit toujours porter en lui la puissance créatrice d'une société en perpétuel devenir, cherchant sans cesse un aboutissement glorieux comme l'indépendance dont rêvaient le peuple et ses moudjahidine. [Il faut] sortir du «Barzakh» de 132 ans de colonisation, puis s'écarter du Barzakh, «ce grand malheur insupportable», déchets et scories d'une colonisation ou telle guerre, ici et là, monstrueuse vésanie qui défait les peuples et en fait plus précisément «les gens du Barzakh» qui se rangent aux côtés du frêle personnage Yoko. Ce monde se trouve «alors dans une sorte de Barzakh étrange». Comment réagira Fatouma face à la cruelle douleur qui se lève en elle? - Désolé, madame Fatouma, vous ne pouvez pas avoir d'enfants! Et l'on console la malheureuse comme on peut. Ce rôle choit à Kamel. C'était à Alger, mercredi 1er octobre 1980. [...] La lecture de ce brillant roman Yoko et les gens du Barzakh de Djamel Mati exige de bout en bout, du lecteur l'amour du livre, et alors quel plaisir il en aura tiré, souligné par cette réflexion «Tellement de choses allaient changer...» et par aussi les tout derniers «murmures» de Juba, soudain plus présent que jamais!... On se souviendra de toutes les étoiles perçues.»
MIMOUNI, L'ÉCRIVAIN, TÉMOIN ET CONSCIENCE par Djoher Amhis-Ouksel. Casbah Éditions, Alger, 2015, 123 pages: «Le Livre Algérien entre de bonnes mains. [...] Il en est ainsi lorsqu'il est l'oeuvre pure de lécrivain éducateur et éveilleur de consciences, recourant aux seules sources de ses passions décentes et vers le seul destin qui lui paraît, sans pieux mensonge, plein de la promesse d'une vie humaine heureuse. [...]Il en est encore ainsi lorsque le lecteur ne cherche pas à s'amuser, mais à lire pour apprendre et comprendre et à faire aimer la lecture autour de lui. L'homme doit apprendre à aimer, c'est sûr; et d'abord apprendre à lire pour aimer. Aussi, «faire connaître les siens par la lecture», est-ce toujours de cette façon que j'aurais à définir l'impeccable travail de recherche de Mme Djoher Amhis-Ouksel qui, étude après étude, propose avant tout aux jeunes, à nous tous, même à notre âge, surtout à notre âge, un livre, un auteur algérien à la lecture. Cette grande Dame, normalienne, inspectrice de l'enseignement, professeur de lettres françaises à la retraite, et femme auteur de Le Chant de la Sitelle, «pour une symphonie humaine», sa propre biographie, a publié récemment dans sa déjà consistante collection «Empreintes», Mimouni: L'écrivain, témoin et conscience. [...] Rachid Mimouni a souvent dans ses écrits traité de «thèmes dominants», il en est de ceux qui heurtent atrocement toutes les consciences et très spécialement celle de l'écrivain qui se donne tout naturellement - et c'est sa fonction la toute première et la toute essentiellement morale, car humaine - «un rôle de témoin et de conscience». Justement, Mme Amhis-Ouksel s'est proposé d'étudier, dans les ouvrages de l'un de nos écrivains postindépendance à la vertu productive, de singuliers aspects, parfois peu développés chez nos auteurs. Je parle de la façon la plus subtile, la plus intelligente d'exprimer une idée, un fait ou une résolution ferme et engageante, sans toutefois aller à la violence orgueilleuse qui est toujours sans gloire.
Quand l'humble écrivain met une part, si modeste soit-elle, de lui-même dans son oeuvre, il n'écrit pas par vanité pour en rajouter à sa besace depuis longtemps trop bourrée - il sait qu'elle est trop lourde et pourtant, il ne se décourage pas: il lutte, il vit, et il disparaît en silence. Et tout se ferme derrière lui... Presque aucun son de ses écrits ne retentit dans la tête de la jeunesse, celle-là même qui sera en charge de la vie du pays. Je pense que mon propos n'a rien d'excessif.
En effet, le livre instruit sur l'état de la nation qu'il met en avant par amour, audace et fierté d'être le Livre Algérien, celui de la Nation, et d'autant s'il passe par l'École, par l'Éducation nationale, afin d'élever l'esprit de nos enfants. [...] On peut conclure avec Mme Djoher Amhis-Ouksel, concernant le roman Le fleuve détourné et plus généralement aux oeuvres de Rachid Mimouni: «Dans ce roman, très dense, bien structuré, les mots, sous la plume de Rachid Mimouni ont un sens très fort. L'intention de l'auteur est de dépeindre avec le plus d'objectivité possible la situation de l'Algérie après son indépendance. Sensible à tout ce qui touche un pays qu'il aime, il voit, il a la prescience des dérives qui menacent le pays.» Espérons que l'on saura gré à Mme Djoher Amhis-Ouksel qui, depuis quelque temps avec sa collection «Empreintes» défend le Livre Algérien porteur d'analyses justes, utiles, éducatives à notre société jalouse de son patrimoine culturel, - ce qui me réjouit profondément, car moi-même déjà depuis 1962-1963, j'essaie de porter haut le Livre Algérien dans la revue Atlas Algérie, puis dans le journal Le Peuple, puis El Moudjahid, puis L'Expression,...»
(À suivre, mercredi 19 octobre 2016.)

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