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Fernand Iveton, le communiste qui a fait trembler la Ve République

Les films sur la guerre d'Algérie font toujours mal en France. Le dernier en date est le film sur Fernand Iveton, un ouvrier communiste et militant de l'Algérie indépendante. Le film est basé sur le livre De nos frères blessés, de l'écrivain français Joseph Andras, paru en 2016, et qui s'intéresse particulièrement «aux dernières années de la vie de Fernand Iveton, à sa rencontre avec sa femme Hélène, ou encore son procès», devant un tribunal militaire, a indiqué le réalisateur français Hélier Cisterne (réalisateur de Vandal en 2013 et de la série Le Bureau des légendes).
Ouvrier et communiste, Fernand grandit au Clos-Salembier, dans un quartier populaire d'Alger, où se mêlent populations arabe et européenne de milieux modestes. Né en 1926, il n'a pas 20 ans quand «des milliers de musulmans» sont massacrés à Sétif et Guelma. Ils fêtaient la libération, croyant, à tort, que c'était aussi la leur. Hommes, femmes enfants, l'armée tire sur «tout ce qui bouge, pour écraser la contestation». À Fernand qui les interroge et les écoute, ses voisins arabes racontent «des histoires à dormir debout. Des gens brûlés vivants avec de l'essence, des récoltes saccagées, les corps balancés dans les puits, comme ça, on les prend on les jette».
En 1955, Fernand Iveton rejoint l'organisation militaire du Parti communiste algérien. Aux côtés du FLN, il veut se battre pour une Algérie qui accorderait enfin à tous les mêmes droits.
Hostile aux attentats aveugles et meurtriers, il accepte néanmoins de poser une bombe dans son usine de gaz, après la fermeture, dans un endroit isolé où personne ne serait blessé. Il est repéré et dénoncé par un contremaître. Désamorcée, la bombe ne fera ni victimes ni dégâts. De toute façon, de l'aveu d'un expert convoqué au tribunal, elle n'aurait pas «fait de mal à une mouche».
Torturé des heures à l'électricité, il finit par lâcher trois noms, le plus tard possible. Le reste du réseau, tente-t-il de se rassurer, a eu le temps de fuir. Après un procès expéditif devant la justice militaire, il est condamné à la peine capitale. Les avocats entament les recours, puis les demandes de grâce auprès du trio Coty (à l'Elysée), Mollet (président du Conseil) et Mitterrand (garde des Sceaux). Sans succès: le tourneur Iveton n'a ni soutiens ni relais dans les milieux politiques et intellectuels. Si des sections syndicales de la CGT se mobilisent, l'Humanité et le PCF ne plaident sa cause que du bout des lèvres.
Le 11 février 1957, Fernand Iveton est réveillé à l'aube et conduit à la guillotine. Pour vaincre sa peur, il «hurle dans les couloirs: Tahia El Djazaïr!: Vive l'Algérie!». Et toute la prison de clamer avec lui: «Tahia El Djazaïr!». Sa tête tombe à 5 heures 10. Il a 30 ans à peine.
C'est dans un livre portrait au cordeau d'un ouvrier broyé par l'ordre colonial ni emphase ni misérabilisme que Joseph Andras, un pseudonyme- sinon qu'il vivrait en Normandie, voyagerait régulièrement à l'étranger et serait né, selon son éditeur, en 1984 (année orwellienne). Actes Sud fournit obligeamment la photo qui illustre cet article. Joseph Andras a refusé le prix Goncourt du premier roman qui lui était attribué, sans se déplacer. S'agit-il d'un écrivain célèbre se faisant passer pour un primo-romancier? Le Monde a mené son enquête, suivant notamment la piste Kamel Daoud, sans en tirer de conclusions.
«L'auteur a choisi de se présenter au lecteur sous le prénom Joseph, «comme le charpentier [le père de Jésus] ou comme le petit père des peuples [Staline]», écrit-il à propos d'un de ses personnages.

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