L’inculpé qui ratait tout
Il est franchement toujours intéressant d’assister à des débats, où l’inculpé de trafic de came, Hamidou D. fit, sans contrainte, ni oppression, son mea-culpa, avant de se mettre carrément à table…
«Vous avez fait le malin, et voilà le triste et regrettable résultat ! Qu’avez-vous à dire, inculpé ?», articula lentement, l’élégant juge Fayçal Bekassem, égal à lui-même, comme toutes ses audiences, avec maestria, générosité dans l’écoute des autres, impartial, et décidé à terminer ses audiences sans le moindre incident. Le jeune prévenu de commercialisation de came, fait prévu et puni par la terrible et crainte loi 04-18 du 25 décembre 2004, à travers son redoutable article 17, notamment est paradoxalement serein. Son conseil, Me Nassima Aïd lui avait certainement soufflé les dommages que cause souvent, si ce n’est toujours, ce fameux article. Puis, elle entra dans le vif du sujet : «Effectuons d’abord, M. le président, un p’tit tour de reconnaissance et même de révision, de ladite «implacable» loi. En effet, la commercialisation de la drogue, via son article 17, est, pourtant, depuis plus de vingt ans, combattue avec «férocité» par les magistrats! Il faut de suite, aborder la manière «bête» avec laquelle, mon client, Hamidou D. avait été interpellé. Disons illico presto que le facteur chance a joué en faveur des éléments de la police judiciaire, qui effectuaient une ronde de routine, à l’heure de l’entrée des collégiens dans les établissements scolaires. Oui, il arrive très fréquemment aux flics, lors de leurs sorties, d’avoir un «sixième» sens, pour ce qui est des recherches des dealers, et autres drogués. Cette fois-ci, Hamidou G., un jeune «marchand de la mort» était adossé contre le mur d’un petit kiosque à journaux, lorsque la voiture-radio de la sûreté de daïra, passa en trombe dans les parages. C’est alors que le vieux chauffeur de la VR de police vit dans son rétroviseur, qui lui causa une grosse ire, Hamidou lever le bras, en signe d’agacement, et plus, d’énervement, lors du passage du véhicule des policiers. Il fit marche arrière, et arriva lentement, à hauteur du jeune homme appuyé contre le mur. L’officier de police quitta l’auto, et se dirigea, le sourire en coin, vers le «mécontent» du moment, avant de lui demander le pourquoi de ce geste de désapprobation. Hamidou, avec une incroyable audace, répondit effrontément à l’homme de loi : «Vous êtes passés devant les citoyens avec un mépris qui ne vous honore point !» s’écria le gus, dont les propos venaient d’atteindre directement l’officier de police. Ce dernier, gardant son calme, demanda les papiers d’identité du malappris, qui venait ainsi, de tenter une humiliation publique et surtout, gratuite du corps de police. Ce fut le tournant de l’affaire, qui allait s’envenimer, et drôlement… Hamidou tendit d’un geste brusque sa CNI aux policiers. C’en était de trop ! Un des deux brigadiers empoigna le bonhomme et le conduisit vers l’auto. Une fouille anodine fut effectuée. Et le plus jeune flic eut la surprise de trouver un paquet dans l’une des poches de la veste, que l’interpellé portait machinalement sur l’avant-bras.
Le policier héla l’officier. Il lui tendit le gros suspect, paquet, qui venait, d’être confisqué au bonhomme. Ils y découvrirent mille deux cents cachets psychotropes ! La petite et poussée, fouille du fameux paquet allait permettre aux policiers, de passer la paire de menottes, pour un grave délit ! Hamidou, dont la physionomie, allait changer de couleur, s’aperçut en un éclair que son arrestation allait durer un bon bout de temps. Sa face venait de passer de la «blancheur» de la légendaire sérénité, à l’affreuse lividité ! Au tribunal, Hamidou D. s’est fait tout petit. Il venait de réaliser que sa bêtise de jouer au brave, prenait une autre tournure : celle d’inculpé de trafic de came !» A murmuré l’avocate de Chéraga, qui vit Belkessam reprendre dans la foulée : «C’est par un fâcheux geste que vous aviez été ‘’pris’’ par une équipe de police en ronde routinière.» L’inculpé, qui savait que les carottes étaient cuites, ne dit mot. Il se balançait, comme s’il faisait un gros effort pour rester debout, tenant à peine sur ses petites jambes.
Le juge avait saisi le sens de son silence. Il se pencha sur le côté d’Okba Djabri, le jeune et discret procureur qui avait réclamé une très lourde peine, de 12 ans d’emprisonnement ferme pour trafic de came. Après le prononcé du traditionnel dernier mot de l’inculpé, Belkassem mit l’affaire en examen.