«Oui, j'ai frappé ma mère»
Les inculpés ou les accusés mineurs posent beaucoup de problèmes inhérents à la mauvaise lecture des textes, par de jeunes magistrats formés par d'anciens enseignants dans la magistrature, pourtant, bien à l'aise...
«Racontez -nous un peu cette histoire de vouloir «punir» votre maman, pour des dinars qu'elle n'avait pas sur elle», commença par dire la juge à l'intention de l'inculpé, qui était ramassé sur lui-même, tant la honte l'envahissait. Il releva un peu plus sa petite tête, regarda autour de lui, dans une salle désespérément vide et articula sans ton: «Le fric qu'elle a en banque ne lui appartient pas. C'est le capital -décès de mon regretté papa, lequel a succombé il y a deux années qui nous a laissés, à mes deux soeurs et moi, une grosse somme pour vivre... Et je...
-Non, jeune homme! Erreur, faute et grossière bêtise! Votre défunt père a d'abord laissé à votre maman, puis à ses enfants, de quoi survivre. C'est elle, l'unique héritière. C'est même elle seule qui a remplacé votre père. Lorsque vous fonderez une famille, vous serez alors ce que vous rêvez d'être en ce moment. Et uniquement cela!
Le monde est ainsi fait. Vous n'y pouvez rien, même si nous devons vous rappeler que la maman doit rester en dehors des histoires de familles! Elle seule sait, et très bien même, ce qu'elle vous doit!»
La magistrate avait fini son sermon, en attendant d'entendre H.M.
La soeur ainée de l'inculpé racontera les faits tels qu'ils s'étaient déroulés en octobre 2024. «Le jour des faits était un vendredi. Ma mère venait de rentrer du marché de la cité, lorsque R.M.l'aborda d'un ton menaçant: «Alors, tu me remets les 2 000 DA que je t'avais réclamés tôt le matin, avant que tu n'ailles au marché.» Maman répondit de suite qu'il ne lui restait plus grand-chose et donc qu'elle n'attendait que le 22 du mois, pour retirer la pension. Comme nous étions le 15, mon frère cadet lança un juron inapproprié et prit sa maman au collet, la menaçant de lui administrer une raclée. Je criais derrière lui, le menaçant, à mon tour, d'appeler mon oncle qui n'aimait pas ce genre de comportement. Il fut alors pris d'une crise de nerfs et voulut se jeter carrément sur ma mère, dont la corpulence n'aurait pas résisté au poids de mon frère. C'en est trop, Madame la présidente, maman, ma soeur et moi sommes fatiguées! Faites en sorte, S.V.P., qu'il nous laisse tranquilles à l'avenir. C'est tout ce que nous réclamons à la justice!», fondit en larmes, la dame, en narrant sa touchante et émouvante intervention. C'est au tour du parquetier d'entrer dans la danse. Il flétrira d'emblée les actes vils concernant surtout les ascendants. Vouloir agresser celle qui vous a mis au monde et fait grandir n'est à l'honneur de personne. C'est pourquoi je réclame le maximum de la peine prévue à l'article 267 du Code pénal, même s'il n'y a pas eu de coups et blessures! Mais en droit, l'intention vaut l'action!»
Un brouhaha inonda la salle d'audiences, comme pour montrer l'ébahissement des peu nombreux individis présents. Me Nassima Aïd, l'avocate du jour, est d'une jovialité qui montre l'optimisme du Conseil, qui interviendra sans discontinuer! D'ailleurs, elle ne s'étalera point sur l'affaire mais dira, comme pour saluer le tribunal: «Madame la présidente, avec votre expérience, vous connaissez très bien les familles. Il y a en leur sein du bon et du moins bon!
Je vous demande aujourd'hui, et j'insiste, exceptionnellement, de prendre en considération le fait que le geste d'agression a été stoppé net par l'aînée, qui a eu le réflexe opportun d'être là au bon moment. Je réclame de larges circonstances atténuantes. C'est pourquoi, comme pour lui donner la meilleure des leçons, et cela serait une très bonne occasion pour lui, de méditer ce qu'il faudra ne plus faire, ou dire à sa mère en particulier et aux gens d'une manière générale, que je vous demande de condamner, certes, mon fougueux client, mais au sursis.». Sur ce, l'inculpé est sommé de ne pas s'attarder, après avoir prononcé le dernier mot que la loi lui accordait. Sur le siège, la juge condamne l'inculpé à une peine d'emprisonnement ferme de cinq ans.