L'Expression

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Lounès Ghezali ,écrivain, à L'Expression

«L’écriture est le miroir de nos rêves»

Lounès Ghezali est un écrivain vivant dans la région de Mizrana, près de Tigzirt (Tizi Ouzou). C’est un passionné de littérature, qui occupe une place très importante dans sa vie. Auteur de plusieurs romans, il nous parle, dans cette interview ,de son tout dernier-né.

L'Expression: Dans votre troisième et nouveau roman, vous avez opté pour une narratrice, pourquoi un tel choix?
Lounès Ghezali: Je n'ai pas de raisons spécifiques qui me poussent au choix des personnages. Sinon peut-être celles de toutes ces vies que je vois vivre autour de moi ou des fragments de choses qui me restent dans la mémoire. Après, tout dépend du lourd murmure intérieur de chacun. Parfois, ce n'est qu'après que le poète ou le musicien prend la mesure de son chant. Bien sûr qu'on ne peut échapper aux empreintes (pénibles ou pas d'ailleurs) de nos vies et ce, même si l'écriture romanesque est d'abord un monde imaginaire. Pour cette fois, dans ce roman, puisqu'il s'agit d'une narratrice, il se peut que ce soit la symbolique de cette mère éternelle qui symbolise la vie et qui triomphe de la mort, qui sait?

Dans ce roman, il y est question de mort, pouvez-vous nous parler un peu de cet aspect de votre roman?
Avec un peu d'ironie, je suis tenté de dire que c'est un sujet d'actualité. La mort est partout présente, surtout ces derniers temps. Nul besoin d'aller explorer des horizons lointains pour parler de ce sujet qui intrigue, par ailleurs, l'homme depuis la nuit des temps. Mais dans ce livre à paraître, la mort se raconte dans un genre particulier (autotanathographique) qui est celui de raconter sa propre mort, du moins, ses ultimes moments. Dans les tragédies grecques, la mort a son mot à dire dans les débats. Elle prend la parole. Et si la mort a des choses à dire, c'est que l'homme aussi ne supporte pas son silence... Comment rester impassible devant cette violence de voir des êtres chers arrachés soudainement à nos possibilités ici-bas? Comment supporter de les voir partir dans le silence et la banalité, parfois sans pouvoir leur dire quelques dérisoires paroles humaines?

Comment s'effectue le choix des thèmes de vos romans?
Je pense que cette question est très liée à la première. D'abord, il y a toujours ces fragments de notre vie qui servent de socle pour former ce monde imaginaire dont on a besoin pour écrire. Ensuite, il suffit juste de savoir écouter les voix intérieures qui nous traversent. Que ce soit dans nos moments difficiles ou, inversement, dans nos moments de joie; il suffit d'écouter les murmures continus comme des échos qui arrivent à nous. Les choses couvent jusqu'à maturité.

Ecrivez-vous pour vous ou pour vos lecteurs?
Non, je ne pense pas à un public particulier en écrivant sinon, je m'aurais fait des contraintes et des orientations qui ne seraient pas miennes. L'écriture romanesque est plutôt un espace ouvert aux mythes. Cette écriture à mon avis doit refléter le miroir de nos rêves, de notre âme. C'est un retour sur soi dont on n'a pas à s'encombrer trop de la complicité de l'Autre.

Est-ce que les trames de vos romans se construisent au fur et à mesure que vous écrivez ou bien tout est préalablement conçu dans votre tête?
Je pense qu'au départ, du moins en ce qui me concerne, cela commence par une sorte de révélation un peu crue pour ainsi dire d'une quelconque histoire. Puis, au fil de l'écriture, on peut pousser le récit vers plus de possibilités en rajoutant des scènes, des images qui arrivent à nous progressivement. Pour l'exemple, je suis en train de décrire les transformations intérieures d'un personnage algérien de la fin du XIXe siècle au contact avec les premiers Français qui arrivaient à cette époque. Pour la première fois, ce personnage est confronté à un monde nouveau; il est confronté à une autre culture, une autre langue, une autre religion. C'est ce personnage qui me fait découvrir, y compris à moi, cette période fascinante.

En rédigeant vos livres, vous arrive-t-il souvent de penser et d'être influencé par les écrivains qui vous ont marqué?
Bien sûr, je pense à d'autres écrivains. De toute façon, on ne peut que vomir ce que l'on a lu. Quelques écrivains laisseront à coup sûr d'indéniables traces. On ne peut effacer ce substrat enfoui au fond de nous-mêmes.

Dans un monde complètement envahi et dévoré par l'Internet, ne pensez-vous pas que le livre est vraiment orphelin aujourd'hui?
Nous vivons une époque de grands changements. Nous sommes à la fin d'une ère qui a commencé au milieu du XVe siècle avec l'invention de l'imprimerie. Aujourd'hui, le mode d'expression à travers le papier est en train de disparaître, progressivement. Nous sommes, aujourd'hui, comme fut autrefois ce monde post Gutenberg qui a été marqué, lui, par la fin de l'expression par la sculpture et l'art plastique en général. Victor Hugo avait magistralement décrit ce monde de la pierre qui se fermait dans son roman «Notre Dame de Paris». Il y a une phrase qui m'est restée dans la tête: Le rat (il parlait du papier) rongeur de l'édifice. Aujourd'hui, ironie de l'histoire, c'est la souris de l'ordinateur qui est (rongeur) du papier.

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