Assia Djebar (1936-2015)/D’Alger à paris
Un parcours littéraire très dense
Elle est élue au fauteuil 5 de l’Académie française, succédant à Georges Vedel. L’écrivaine est docteur honoris causa de l’université de Vienne, Autriche...

Par Nordine BEKHTAOUI
Femme de lettres algérienne d’expression française, Assia Djebar est le nom de plume de Fatima-Zohra Imalhayène. Née le 30 juin 1936 à Cherchell dans l’actuelle wilaya de Tipaza, elle est auteure de nombreux romans, nouvelles, poèmes et essais. Assia Djebbar a écrit également pour le théâtre et a réalisé de nombreux films. écrivaine prolifique, elle est considérée parmi les auteurs les plus influents de la rive sud de la Méditerranée. Élue à l’Académie française en 2005, elle devient la première écrivaine nord-africaine à accéder à la prestigieuse institution littéraire de la langue française. Issue d’une famille appartenant à la petite bourgeoisie ; son père était instituteur.
Dès sa prime enfance, elle étudie à l’école française. Elle étudie également le Coran dans une école privée. Elle entre au collège à Blida où elle apprendra le grec ancien, le latin et l’anglais. Elle obtient son baccalauréat en 1953 au Lycée Bugeaud d’Alger : l’actuel Lycée Emir Abdelkader. En 1954, elle entre au lycée Fénelon de Paris. L’année suivante, Assia Djebbar intègre l’École normale supérieure de jeunes filles de Sèvres pour étudier l’Histoire. En 1956, elle prend part à la grève lancée par, l’UGEMA : l’Union générale des Étudiants musulmans algériens. Elle sera exclue de l’école pour y avoir participé et refusé de passer ses examens.
Assia Djebbar est le nom de plume qu’elle choisit pour éviter de choquer sa famille comme bon nombre d’artistes de l’époque. En 1957, elle publie chez Julliard - Paris, La Soif (roman) L’année suivante, elle sort Les Impatients : un autre roman chez la même maison d’édition. En 1959, en raison de son talent littéraire, le général de Gaulle intervient en personne pour sa réintégration dans l’école. Elle épouse l’écrivain Walid Garn, pseudonyme de l’homme de théâtre Ahmed Ould-Rouis et quitte la France pour l’Afrique du Nord où elle étudiera et enseignera les lettres modernes contemporaines à la faculté des lettres de Rabat. Le 1er juillet 1962, elle retourne en Algérie où elle sera nommée professeure à l’université d’Alger pour être le seul professeur à dispenser des cours d’histoire moderne et contemporaine de toute l’Algérie. Dans cette période de transition postcoloniale, la question de la langue de l’enseignement se pose. Lorsque l’enseignement en arabe littéraire est imposé, elle quitte l’Algérie.
Elle sort en France, Les enfants du nouveau monde (roman) en 1962. Elle adopte en 1965 avec Walid Garn, l’orphelin Mohamed Garne : une victime de guerre née du viol d’une femme par des soldats français. Elle publie les Alouettes naïves (roman) en 1967 suivi de Rouge l’aube : pièce de théâtre (Sned) et Poèmes pour l’Algérie heureuse, recueil de poésie (Sned) 1969. Assia Djebbar a également, écrit des nouvelles ; elle publie en 1969 Femmes d’Alger dans leur appartement et plus loin en 1997, Oran, langue morte. Durant la période allant de 1966 à 1975, elle alterne les résidences et les séjours entre l’Algérie et la France.
Elle épouse en secondes noces Malek Alloula, dont elle se sépare plus tard. Assia Djebbar enchaîne avec le roman en publiant : L’Amour, la fantasia (1985), Ombre sultane (1987), Loin de Médine (1991) et Vaste est la prison (1995). L’année d’après, elle sort le Blanc d’Algérie, (récit). Viennent ensuite en 1997 Les Nuits de Strasbourg, et Oran, langue morte, respectivement, roman recueil de nouvelles puis deux ans plus tard, elle sort à Montréal- Canada, Ces voix qui m’assiègent... en marge de ma francophonie (essai), puis en 2000, Filles d’Ismaël dans le vent et la tempête (théâtre musical). De 1997 à 2001, elle dirige le Centre d’études francophones et françaises, à l’université de l’État de Louisiane- USA.
L’œuvre littéraire de la romancière ne s’arrête pas là puisqu’elle enchaîne avec trois romans, à savoir : La Femme sans sépulture (2002), La disparition de la langue française (2003) et enfin, Nulle part dans la maison de mon père (2007). Le 16 juin 2005, Assia Djebbar est élue au fauteuil 5 de l’Académie française, succédant à Georges Vedel. L’écrivaine est docteur honoris causa de l’université de Vienne- Autriche, de l’université Concordia de Montréal-Canada et de l’université d’Osnabrück-Allemagne. Assia djebbar a également, laissé son empreinte dans le monde du cinéma. Elle s’ajoute à son œuvre littéraire féconde, puisque pendant les années 70 où elle délaisse l’écriture, elle se tourne vers ce mode d’expression artistique.
Elle réalise deux films, La Nouba des Femmes du Mont Chenoua en 1978 : un long-métrage qui lui vaudra le Prix de la Critique internationale à la Biennale de Venise en 1979 et un court-métrage en 1982, La Zerda ou les chants de l’oubli en coscénariste avec Malek Alloula. En 1999, elle soutient sa thèse à l’université Paul-Valéry Montpellier 3 ; une thèse autobiographique. La même année, elle est élue membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique. Mine de rien, l’œuvre de la romancière est traduite dans 21 langues. De 1962 à 2006, la romancière cumule une quinzaine de Prix littéraires internationaux y compris au cinéma pour La Nouba des Femmes du Mont Chenoua (Long métrage). Elle est décorée Chevalière de la Légion d’honneur et de Commandeure de l’ordre des Arts et des Lettres.
Elle meurt le 06 février 2015 et inhumée à Cherchell : sa ville natale en présence d’une foule humaine nombreuse composée de proches, d’officiels et des personnalités du monde littéraire et des arts. En 2015, il est créé en Algérie, le Prix Assia Djebar du roman pour promouvoir la production littéraire algérienne.