Le zellige de Tlemcen: un patrimoine matériel unique
Le zellige de Tlemcen est un patrimoine matériel qui distingue la ville par son esthétique unique, la différenciant d'autres types de carreaux et reflétant la créativité et l'héritage de l'architecture islamique à travers les âges.
L'histoire du zellige en Algérie a connu plusieurs étapes. Avec l'avènement de l'ère Hammadite en 1005, qui a coïncidé avec la construction de la Citadelle de Beni Hammad, cet art a atteint son apogée en termes de précision et de professionnalisme. Les fouilles archéologiques ont révélé son utilisation dans le pavage des sols, le revêtement des murs et des fenêtres.
"Au 13ème siècle, cet art a connu une grande prospérité sous le règne des Zianides à Tlemcen", a déclaré à l'APS Zoulikha Benchenafi, Commissaire du patrimoine culturel et Cheffe du service de recherche, de publications et de documentation au Musée public national de l'archéologie musulmane de Tlemcen.
Ces pièces en céramique se caractérisent par une multiplicité de formes et de couleurs. Assemblées selon des plans précis, elles forment de magnifiques panneaux décoratifs aux motifs géométriques, floraux ou calligraphiques. Elles sont principalement utilisées pour le carrelage des sols et le bas des murs, et parfois pour recouvrir des colonnes et des seuils de portes.
Afin de valoriser et préserver ce patrimoine, la direction de la Culture et des Arts organise des ateliers en coordination avec les musées de la wilaya. Des visites fréquentes sont également effectuées chez les artisans des communes de Nedroma et Maghnia, spécialisés dans la fabrication du type "Kirati". Des journées d'étude sur l'histoire du zellige et la préparation d'un livre sur cet art sont aussi prévues, a ajouté le directeur de wilaya du secteur.
Il est également prévu d'organiser d'autres ateliers pour former une promotion spéciale d'artisans de l'argile à l'Institut national spécialisé dans la formation professionnelle, l'hôtellerie et le tourisme de Mansourah, a-t-il dit.
Pour rappel, le directeur du Centre national de recherches en préhistoire, anthropologie et histoire d'Alger, Slimane Hachi, a souligné dans une conférence animée récemment au musée public national "Ahmed Zabana" d'Oran, dans le cadre du mois du patrimoine, que l'Algérie a présenté, au cours du mois d'avril dernier, un dossier à l'UNESCO sur "l'art de sculpture architecturale en zellige" pour l'introduire à la liste représentative du patrimoine culturel matériel de l'humanité".
Il a fait savoir que "le zellige existe en Algérie en tant que pratique culturelle, urbaine et artistique dans la décoration des bâtiments. La preuve en est qu'il est présent, depuis plusieurs siècles, dans le site archéologique de la citadelle de Beni Hammad, inscrit au patrimoine culturel matériel de l'UNESCO et est également présent dans d'autres sites archéologiques de l'Ouest et de l'Est du pays".
L'atelier de l'artisan Medelci au quartier Safsif, dans la commune de Tlemcen, est considéré comme l'un des plus anciens ateliers consacrés à cet art dans la ville. Ce spécialiste l'utilise pour valoriser et développer le Kerati, une sorte de zellige de luxe.
Medelci s'appuie sur la méthode traditionnelle de fabrication du zellige, avec de la pâte d'argile et un four traditionnel pour cuire les carreaux de zellige.
Il a déclaré que "les familles de Tlemcen sont très demandeuses de modèles uniques pour décorer leurs maisons en carrelage".
Cet artisan a marqué de son empreinte le processus de restauration de l'ancienne mosquée "Sidi Braham", au cœur de Tlemcen. Il a su ressusciter les carreaux "émeraude" d'origine dans leur forme primitive, en employant une matière première locale, en collaboration avec l'entreprise de céramique de Maghnia.
Le zellige occupe une place prépondérante dans le cœur des Tlemcéniens. Les artisans spécialisés dans cet art ancestral s'emploient à le développer, à créer des modèles alliant authenticité et modernité, et à élargir ses usages dans les projets de décoration des établissements hôteliers de la wilaya.