L’hymne assassiné

Ali Maâchi est le poète et chanteur qui symbolise parfaitement l’engagement artistique en faveur de l’indépendance algérienne. C’est lui qui incarne le plus cette vocation : celle d’avoir été à la fois un artiste et un militant engagé contre le colonialisme français.
Le fils de Tiaret, où il naquit le 12 août 1927, a fait de ses chansons des déclarations politiques où il clamait haut et fort son opposition au colonialisme et sa fibre nationaliste totale et indéfectible. Ses deux facettes d’artiste génial et de militant engagé ont fait de lui cet éternel symbole qu’on célèbre tout le temps et auquel on ne cesse de rendre hommage et, à travers lui, honorer le combat de tout un peuple contre le joug colonial et pour son indépendance. Ses mélodies d’Algérie (Angham El Djazair), enregistrées en 1956 en pleine guerre d’indépendance, sont à la fois un chef-d’œuvre artistique et une déclaration politique. Bien que n’ayant vécu que trente ans, Ali Maâchi a marqué son peuple et son temps. Martyr, il a été assassiné par l’ennemi colonial le 8 juin 1958. C’est la date du 8 juin qui a été retenue par l’Algérie pour en faire la Journée nationale de l’artiste où, chaque année, un hommage est rendu à Ali Maâchi mais aussi aux artistes qui contribuent, chacun à sa manière et dans sa discipline, à la promotion de la culture algérienne sous toutes ses formes. De même que, depuis 2008, un Prix Ali-Maâchi a été lancé par le ministère de la Culture. Il est attribué annuellement aux jeunes créateurs de divers genres. C’est le moindre hommage qui puisse être rendu à un chanteur-poète qui a sacrifié sa vie pour l’indépendance de l’Algérie et dédié son œuvre pour la même grande et noble cause.
La vie dure de l’époque poussa Ali Maâchi à interrompre ses études pour prêter main forte à son père qui était fellah.
À la fin des années 1940, il effectue son service militaire en Tunisie pour revenir s’installer à Alger après avoir vécu à Tiaret.
Dans la capitale, il accède à la Radio pour y exercer en tant que technicien. Ce qui lui permit d’ouvrir les yeux sur le monde artistique et de réveiller le talent qui sommeillait en lui depuis longtemps. C’est dans cette ambiance culturelle et plus particulièrement artistique qu’Ali Maâchi commença à écrire, à composer et à chanter.
Tout en multipliant les voyages pour élargir sa vision du monde et de l’art, Ali Maâchi réfléchit mûrement à la manière de s’adonner à son art. Il finit par se résoudre à mettre en place une troupe artistique qu’il dénomma Safir El-Tarab ou l’ambassadeur de l’art. Son côté nationaliste s’affirma dès le départ puisqu’il déclina fermement l’offre de faire éditer ses chansons par un éditeur français. Cette position révéla d’emblée le genre d’artiste qu’allait devenir Ali Maâchi.
Une telle proposition aurait séduit n’importe quel autre artiste mais Ali Maâchi plaçait ses convictions politiques de nationaliste avant toute autre considération. Durant la très courte période qu’a duré son parcours artistique, Ali Maâchi a été prolifique. Il a écrit et composé plusieurs chansons de haute facture artistique et poétiquement très élaborées.
D’ailleurs, ces dernières seront reprises plus tard par des sommités de la chanson algérienne comme ce fut le cas de Taht samaâ El-Dajzair, reprise par Mohamed Lamari. Il a écrit et composé des chansons pour d’autres artistes de l’époque, à l’instar de Larbi Hachemi, Mohamed Tahar El Mosteghanemi… Arrêté et torturé en 1958, Ali Maâchi meurt en martyr pour l’Algérie libre et indépendante.
Deux précieux livres du célèbre chercheur et historien Amar Belkhodja nous font découvrir l’artiste Ali Maâchi dans tout son talent et avec toute sa dimension militante. Il s’agit d’Ali Maâchi, art et combat et Ali Maâchi, l’hymne assassiné, d’où est tiré le titre de cet article.