Du sens de l’histoire
Djamel Ould Abbès, ministre de la Solidarité nationale et de l´Emploi, nous parlait tout récemment de la grande importance qu´il accordait au colloque relatif aux mines antipersonnel. Ce n´est, du reste, pas pour rien, si c´est le président Bouteflika en personne qui parraine cette rencontre à laquelle prendront part de nombreux responsables et experts internationaux. Ce n´est pas, non plus, un hasard si cette rencontre, qui s´ouvre demain, coïncide avec les tragiques événements du 8 Mai 45. Le ministre algérien a ainsi décidé de profiter de cette double conjoncture, on ne peut plus propice, pour enfoncer définitivement le clou en déclarant que l´Algérie a l´intention de demander réparation à la France pour ses nombreux crimes commis durant la guerre d´indépendance.
Sans doute fallait-il que les passions s´apaisassent de part et d´autre, que les relations entre Alger et Paris connussent un tournant qualitatif certain, pour que les deux parties trouvassent la volonté d´aller vers ce devoir de mémoire et de vérité tellement nécessaire pour remettre les compteurs à zéro, afin que plus rien de cela n´advint. L´ambassadeur de France en Algérie, à partir de Sétif, avait eu l´insigne courage de reconnaître les crimes français, alimentant ainsi les quêtes de verdict, de la Fondation 8-Mai 45 que dirige Bachir Boumaâza.
Les autorités algériennes n´avaient plus qu´à profiter de cette brèche pour finir de pousser l´ancienne puissance coloniale à aller vers les réparations, seraient-ce morales, une fois admis ces crimes atroces commis sur le peuple algérien, et dont les conséquences continuent de se faire jour à la faveur de l´explosion de mines sur les frontières est et ouest du pays, où étaient implantées les redoutables lignes Challe et Morrice.
En cette période de mondialisation galopante, y compris des droits de l´homme, et où d´aucuns tentent toujours d´épingler l´Algérie sur des faits pour le moins hypothétiques, il serait on ne peut plus «judicieux» pour la France, ce pionnier des valeurs humaines universelles, d´aller plus loin dans les aveux et les réparations. Car, après tout, comprendre le tragique sens de l´histoire, c´est se prémunir définitivement contre sa répétition. C´est pour cette raison aussi qu´avant de s´ériger en donneur de leçons, il convient de balayer soigneusement devant le pas de sa porte.