La messe est dite?
L´APN, version 2007, sera inaugurée jeudi prochain. La messe est-elle dite pour autant? Dit autrement, le pouvoir peut-il faire l´économie d´une analyse des implications du séisme électoral du 17 mai? Dès lors, quels enseignements faut-il tirer des législatives de 2007? Aucun! lance, sentencieux, Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN et chef du gouvernement, chargé sans doute de clore un chapitre ardu d´une parenthèse électorale chaotique. Docte, M.Belkhadem précise: le scrutin du 17 mai ne livre aucun message politique, oui, vraiment aucun. Douze millions de citoyens (2/3 des inscrits) ont décidé de se porter pâles le jour du vote, un million d´autres ont voté blanc, tout cela ne porte pas à conséquence et il n´y a pas lieu de donner à ces défections plus d´importance qu´elles n´en méritent, nous assure M.Belkhadem - qui, sans doute, en a vu d´au-tres - laissant entendre en filigrane que ce n´est pas le peuple qui donne le pouvoir.
Mme Hanoune, porte-parole du PT, propose une autre lecture du fiasco électoral du 17 mai. Les électeurs algériens en s´abstenant, massivement, ont voulu, selon elle, protester contre la politique de privatisation que mène le gouvernement. Ah! on ignorait que le Parlement algérien, qui n´est pas le gouvernement, avait son mot à dire sur la stratégie économique nationale d´une manière générale, sur les privatisations plus particulièrement, ou qu´il ait été à l´avant-garde de ceux qui voulaient brader le patrimoine industriel et économique du pays. On notera seulement que l´Assemblée sortante a adopté à l´unanimité la loi sur les hydrocarbures qui, pratiquement, privatisait la Sonatrach, avant qu´elle ne vote une autre loi qui rétablissait la Société nationale des hydrocarbures dans ses droits. Tout cela sans états d´âme, pour dire que l´APN a toujours été une chambre d´enregistrement dont le rôle se limitait à approuver les textes de lois que l´Exécutif lui soumettait.
Aussi, si sanction populaire il y a, ce n´est certes pas la «politique économique» de l´APN qui est ainsi condamnée, mais un pouvoir incapable de répondre aux attentes et aux doléances des Algériennes et des Algériens qui ont fait montre, en la circonstance, d´une grande maturité politique. Maintenant, venons-en au coeur du problème: de quelle légitimité peut se prévaloir une Assemblée nationale élue avec 35,65% de participation du corps électoral? Contre toute évidence, le troisième héraut, M.Ouyahia en l´occurrence, secrétaire général du RND, estime, pour sa part, que l´APN -qui sera inaugurée ce jeudi- est parfaitement légitime. Nous serons aises que Ahmed Ouyahia nous fasse part de son analyse et nous explique comment il est arrivé à cette brillante déduction qu´une Assemblée nationale élue par 5.726.087 voix exprimées sur 18.760.400 inscrits (chiffres officiels donnés par le ministre de l´Intérieur), conserve, malgré cela, sa légitimité alors même que cette validité est entachée par l´énormité des abstentions? En démocratie, pour qu´un scrutin soit valide, il faut qu´au moins 51% des inscrits prennent part au scrutin. Et c´est loin d´être le cas. Il y a bien le précédent des législatives de 2002 -quand les 2,1% et 1,5% de participation à Tizi Ouzou et Béjaïa ont été validés- et c´est M.Ouyahia qui, le premier, a reconnu que les représentants de ces deux wilayas étaient des «indus députés». Allons-nous alors vers une APN composée de 389 «indus députés» car mal élus et souffrant d´un flagrant déficit de légitimité? Alors, la messe est-elle dite?