Mémoire sélective
La commémoration, cette année, des événements sanglants du 8 Mai 1945, interviendra, comble de coïncidence, au moment où le Parlement français examine la loi Sarkozy sur l´immigration. Un autre triste épisode qui nous rappelle la loi du 23 février glorifiant la colonisation, et dont l´adoption était intervenue curieusement deux mois seulement avant le 8 mai 2005. Pourtant, au moment où on prétend tout faire pour réactiver les discussions autour du traité d´amitié, les nostalgiques de l´Algérie française ne ratent aucune occasion pour tomber à bras raccourcis sur le peuple et les institutions de l´Etat algérien. Il est clair que la loi Sarkozy, qui prône une immigration «choisie» et «utile», véhicule en elle-même cette attitude xénophobe affichée à l´égard de nos ressortissants. L´UMP qui, apparemment, s´est embourbée, depuis la dernière présidentielle, dans une série de scandales, dont le dernier en date est l´affaire «Clearstream» où sont impliquées d´importantes personnalités du gouvernement de Villepin, brandit ainsi l´épouvantail de l´immigration. La seule façon pour justifier la litanie d´échecs, tant sur le plan économique que politique. D´autant plus que la crise des banlieues et ensuite celle du CPE ne sont en réalité que l´expression manifeste d´une marginalisation et d´un manque d´intégration. Le malaise au sein de l´immigration n´est pas seulement lié à la mal-vie, mais surtout au traitement discriminatoire appliqué aux communautés. La mémoire sélective française est le maître mot de cette démarche tendant à ménager la chèvre et le chou et à mettre la victime et son bourreau sur un pied d´égalité. En somme, une amitié basée sur une vision réductrice et «indigénante» des ressortissants des anciennes colonies. Au moment où le gouvernement français se fait l´avocat des Arméniens, en dénonçant le «génocide» de 1915, condamne Maurice Papon pour déportation de Juifs, lors de la Seconde Guerre mondiale, elle laisse le soin aux historiens d´étudier le «cas algérien». Un indice qui ne trompe pas quant au mépris affiché par la France chiraquienne à l´égard des martyrs de Sétif, Guelma et Kherrata et auparavant ceux des enfumades du Dahra. Sans compter la pratique systématique de la torture, qui a nourri ces dernières années les récits relatant les «hauts faits d´armes» des sieurs Aussaresses, Bigeard, Schmitt et Massu. Des crimes avoués, passibles des juridictions internationales, et qui malheureusement restent impunis. De la mémoire sélective à l´immigration choisie, la France, au lieu de se repentir et libérer sa conscience vis-à-vis de ses victimes, continue à se complaire dans la politique de l´autruche. Mais jusqu´à quand?