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LES NOUVELLES DONNES DE L’ANNÉE SÉCURITAIRE 2002

Guerre en réseaux contre les groupes diffus

L’hypervisibilité des attentats terroristes et la sous-visibilité des groupes armés rendent utopique toute analyse fiable.

Ce qu´il faut retenir de l´année sécuritaire 2002, c´est la faculté toujours présente de la part des groupes armés, de porter les attentats là où on les attend le moins. Près de 1 300 personnes tuées depuis le 1er janvier 2002, voilà qui ne prête pas à équivoque.
Cependant, il serait injuste de ne pas insister sur la nette désagrégation des groupes armés en tant qu´organisations militaires structurées et programmées comme des unités de combat. Sur ce plan-là, la guerre est finie et bien finie. Peut-être faudrait-il un autre contexte sociopolitique, des années de conditionnement, un habillage aussi fort que celui de l´islamisme d´entre 1980 et 1990, pour pouvoir revivre une déferlante de la force de ce qu´on a vécu entre 1992 et 1998. Moins de soixante citoyens ont été assassinés durant le ramadan (6 novembre - 5 décembre). C´est le taux le moins élevé depuis 1993 et l´indicateur le plus fiable sur le recul de la force de frappe des GIA. Autre indicateur fiable : la nette embellie sécuritaire vécue par la capitale depuis le mois de juin, bien que la neutralisation du réseau algérois du Gspc après la période estivale, et en plein centre d´Alger, incite à plus de retenue.
Entre janvier et juin, c´est la région de Tiaret qui subit la furie criminelle des groupes armés. A partir de l´été, Chlef s´annonce comme la plate tournante du terrorisme en Algérie. A elles seules, ces deux wilayas comptabilisent près de 300 personnes assassinées, depuis le début de l´année.
Dans la Kabylie où le Gspc joue comme sur du velours, malgré les ratissages ininterrompus des militaires, les choses demeurent confuses, du fait de la neutralisation des services de sécurité locaux par les effets de la crise qui secoue la région depuis bientôt vingt mois.
Après le «délogement» de la Gendarmerie nationale, la police tente, vaille que vaille, de contrôler les accès, surveiller les édifices publics et protéger les personnalités. A la périphérie des villes, la violence grandit et les jeunes sont de plus en plus tentés par la radicalisation.

Nouvelles mutations

Le coup le plus important porté au GIA du fantomatique Oukali Rachid, Abou Tourab, - qui n´a plus donné signe de vie, depuis le fameux communiqué d´intronisation du 14 février 2002 - est sans conteste la mort de Antar Zouabri, le 8 février 2002, dans un accrochage à Boufarik, mais aussi, l´arrestation spectaculaire du «groupe des 16», au début de l´été, et qui constituait la force de frappe du GIA de l´Algérois. Un colloque international sur le terrorisme a été organisé à Alger entre le 26 et le 28 octobre 2002. Ce qui devait être un forum d´intellectuels, un espace de débats, devint une fête ahurissante et suspecte des «éradicateurs» et une critique acérée contre l´islamisme, occultant de larges pans de débats contradictoires et de polémiques utiles. Le colloque prit fin et on ne sait toujours pas quel constat en faire, ni quel bilan en dresser. Pris en sandwich entre le discours d´un Bouteflika conciliateur, fédérateur et pacifiste, et celui d´un Touati suggestif et ambigu, le colloque passa un message lourd qui ne convainquit que ses adeptes et ses organisateurs.
A partir de septembre 2002, nous assistons à un nouveau revirement. Il y eut de moins en moins d´attentats spectaculaires et d´assassinats collectifs, et de plus en plus d´assassinats ciblés et d´attaques contre les forces de sécurité. Même dans les zones où activent le Gspd de Abdelkader Souane (environ 40 à 50 hommes armés, opérant entre Derrag, Tissemsilt et les côtes de Gouraya et Tipasa) et le GIA d´Abou Tourab (près de 70 hommes encore opérationnels, selon les dernières estimations des services de l´armée opérant dans le triangle Médéa, Blida et Aïn Defla, dans les maquis de Chlef, Tissemsilt et Tiaret, et dans les monts rocailleux de Bahrara à Djelfa, et Djebel Grouz à Béchar), les attaques ciblées ont prévalu. Est-ce une nouvelle stratégie pratiquée même par les groupes armés les plus nihilistes et sanguinaires, tel le GIA de Oukali Rachid, afin de s´attirer la sympathie des autochtones? Il faut en tout cas en tenir compte, car les effets sont déjà visibles. Qu´on en juge: plusieurs réseaux de soutien datent de moins d´une année ont vu le jour à Médéa, Ksar El-Boukhari, Boumerdès, Tipasa, Tizi Ouzou et Tébessa. Ces ralliements renseignent sur la capacité d´endoctrinement et de recrutement dans les régions indigentes et incitent à allier à la lutte militaire, d´autres formes de luttes, économique, culturelle ou autres.
Les autres groupes armés, le GSC, dirigé par Douadji Yahia, dit «Abou Amar», estimé à 70 hommes, évoluant à Mascara, Sidi Bel Abbes, Tlemcen, Saïda et Oran, et le Ghds (Houmât Eddaâwa Essalafiya), dont la centaine d´hommes dirigée par Mohamed Benslim, active à Relizane, Gouraya et Chlef, ne font pas le poids devant le Gspc.
L´organisation de Hacène Hattab, forte de ses 380 hommes équipés, structurés et bien entraînés par d´ex-militaires déserteurs (Abbi Abdelaziz et Amari Saïfi) ainsi que par des guerriers audacieux (Saâdaoui et Belmokhtar), reste la hantise de l´armée.
Cesont de nouvelles recrues au passé judiciaire propre, inconnues des services de sécurité, non répertoriées et non fichées . C´est pratiquement- Tout- le monde qui passe de quartier enquartier et se déplace de ville en ville, les transperçant comme du gruyère. Les jeans, baskets et tee-shirts ont remplacé les tenues de guerre, l´âge a diminué et l´experience est un acquis en plusA plusieurs reprises, le GSPC commet des attentats spectaculaires contre l´armée, qui, en moins d´un an, a enregistré la perte de 125 de ses éléments. Les deux plus terribles attentat s contre l´armée se sont produits à Saïda (22 militaires assassinés) et Tizi Ouzou (15 militaires tués et 7 autres enlevés). Les hommes de Hattab n´hésitent pas à tuer des policiers, même dans les centres urbains (Boumerdès, deux auxiliaires tués devant la mosquée), à racketter les automobilistes, même en plein jour (Boghni, Draâ El-Mizan, Draâ Ben-Khedda) et à imposer aux agriculteurs isolés un impôt sur les récoltes (vergers, vignobles et céréales à Dellys, Sahel Bouerak, Legata et les plaines limitrophes de Tizi Ouzou et Boumerdès). Les contrebandiers du sable des régions côtières du Centre et de l´Est, les cigarettiers, les filières de la drogue et les commerçants d´armes du Sud et de l´Ouest algériens sont impliqués dans la stratégie de financement du groupe moyennant une protection et un «ermis d´exercer» au nom du Gspc. Cette connexion est le péril futur de la sécurité, et l´évolution de nouvelles formes de criminalité fait peur. En fait, les services de sécurité se retrouvent face à des ennemis sans nom, sans visage et sans consistance. Ce sont des groupes insaisissables, invisibles, qui continuent de défier les services de sécurité. Sur un total de 400 à 600 hommes opérationnels, seul un quart est fiché et répertorié. Pour les autres, ce sont de nouvelles recrues au passé judiciaire propre, inconnues des services de sécurité, non répertoriées et non fichées. C´est pratiquement Monsieur-Tout-le-Monde qui passe de quartier en quartier et se déplace de ville en ville, les transperçant comme du gruyère. Les jeans, baskets et tee-shirts ont remplacé les tenues de guerre, l´âge a diminué et l´expérience est un acquis en plus. La désintégration des GIA en «djamaâte» éparse, aux visées douteuses, a accentué ce sentiment d´être en plein dans le noir.

Le chaos des «djammaâte»

A partir de Chlef, les groupes connus, tels que le Ghds ou le GSC, ou encore mal définis - et il en existe au moins, deux ou trois - empiètent sur le territoire des autres, s´entrechoquent, s´entre-tuent ou alors composent ensemble, selon les intérêts du jour. Beaucoup de petits groupes activant à Relizane, Saïda, Bel Abbes, Chlef et dans la périphérie d´Oran chevauchent en même temps le théologique, le politique, le brigandage et la criminalité, au point qu´on ne sait plus s´il faut les classer dans le chapitre des GIA ou dans celui du crime organisé.
La vente de drogue, le commerce des armes, le racket, le vol et la contrebande constituent leurs confluences et leurs moyens de s´autofinancer, mais en fait, il serait simpliste d´en tirer des conclusions hâtives. Le «flottement» des autorités concernant le nombre des terroristes encore opérationnels, la répartition géographique des groupes armés, les spots télévisés diffusés à des heures de grande écoute le «verrouillage» de la capitale et les contradictions que recèle le discours des officiels renseignent sur le danger encore actuel, et l´incapacité de cerner au millimètre près les contours des GIA en Algérie.
Selon les aveux des derniers réseaux de soutien démantelés à Médéa, Tizi Ouzou et Boumerdès, il est établi que des recrutements, des ralliements et des connexions se sont faits récemment. Les raisons de ces ralliements restent à (re) définir, car il est certain que les GIA ont procédé à de profondes mutations dans leurs structures internes, bien que le contexte actuel leur soit largement défavorable. Voilà en somme, comment s´est présenté le sécuritaire 2002. Les causes qui ont généré la violence n´ont pas toutes disparues. Le retard cumulé par le gouvernement en matière de relance économique retarde l´éclaircie sociale. La vie politique stagnante interdit tout espoir de perspectives optimistes. La manne pétrolière a fait d´énormes entrées en liquidités, mais le pacte social n´est pas établi. Les équilibres sociaux sont rompus, les disparités restent énormes et l´absence de «proconsuls», ces «bâtisseurs» au niveau des communes, première représentation de l´Etat et interlocuteurs directs du citoyen, est une des causes premières des tensions locales. Les APC, gérées par des élus locaux, restent, à ce jour, le générateur essentiel de troubles dans les zones-crises de l´Algérie tout entière.
Voilà, en grosses lignes synoptiques, comment se dessine l´enchevêtrement sécuritaire, politique, économique et social.
La poussée des militaires, qui ont peu à peu grignoté les derniers sanctuaires terroristes, est sans cesse remise en question par la gabegie sociale, quand l´éclaircie économique n´est pas entachée par un atermoiement politique. Les forces politiques et les jeux de lobbying s´entrechoquent, se neutralisent et, en fait, se paralysent.
Confinant le pays dans un effrayant statu quo. En clair, ce n´est pas encore le bout du tunnel en matière de sécurité des biens et des personnes.

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