LA CORRUPTION ET L'ARGENT SALE ENTACHENT LA CRÉDIBILITÉ DES LÉGISLATIVES
L'urne aux enchères
Le ver est dans le fruit et les observateurs y voient une sérieuse menace sur le processus électoral s'alarmant de l'emprise excessive des grandes fortunes sur la politique.
Les législatives qui se tiendraient le 4 mai prochain, seront certainement les plus onéreuses de l'histoire du pays. L'argent à fait une entrée par effraction dans le monde politique algérien et jamais les affaires de corruption n'ont connu une pareille recrudescence que durant la confection des listes pour les candidatures aux législatives. Et voilà l'urne aux enchères! L'alarme a d'abord été donnée par les partis politiques qui sont montés au créneau. «Devant l'argent sale et les entraves administratives comme l'exigence de l'utilisation d'un logiciel sans moyens ni formation, nombre de nos listes ont été rejetées sans possibilité de recours ou n'ont pu être déposées», a regretté le RCD. Louisa Honoune du Parti des travailleurs qui a déploré qu'«il n'y a plus de morale sociale ni de morale politique» regrette le fait que des partis «connus» ont dépensé des sommes colossales pour réunir les signatures exigées par la loi. Le plus vieux parti d'opposition s'est lui aussi mis de la partie. Dans un communiqué sanctionnant les travaux de son conseil national, a mis le doigt sur la plaie béante de cette corruption politique. Le FFS a frontalement accusé les réseaux mafieux au sein de l'administration «de se livrer à ces pratiques, celle de la vente des signatures aux acheteurs potentiels» avant de dénoncer: «L'administration n'a montré aucune volonté de lutter contre ces pratiques odieuses.» Comme pour rappeler et désigner ouvertement le coupable, le premier secrétaire du FFS, Bouchafaa, revient à la charge: «Ces pratiques sont conduites par des réseaux administratifs mafieux qui ont joué un rôle dans la détermination des listes, voire dans la détermination du champ politique qui sert leurs intérêts, jouissant d'une liberté pour exécuter leur plan en l'absence d'un Etat de droit.» Même les petits partis s'y mettent. Moussa Touati, président du FNA dénonce «ces pratiques mafieuses». C'est dire que le fléau sévit réellement au sein de la classe politique nationale. Quand de lourdes présomptions de corruption par l'argent sale pèsent sur un grand parti comme le FLN, il faut dire que les moeurs et l'éthique politique sont déjà bafoués. Le secrétaire général du parti Djamel ould Abbès avait pourtant averti contre ces pratiques et promis de lutter contre la «ch'kara» allant même jusqu à laisser entendre qu'il fera tomber les peaux mortes au sein même de son parti. Peine perdue hélas! Au moins deux affaires sont en passe d'éclabousser la promesse. Dans l'une de ses éditions le confrère le Jeune indépendant a rapporté qu'une ancienne députée de Constantine «grâce à des enregistrements sonores réalisés par un ancien député de Constantine, où il est question de marchandage dont la valeur a atteint les deux milliards de centimes». La déception ne peut être qu'abyssale pour des électeurs qui attendaient de ce parti d'évincer les candidats corrompus et surtout de participer à un scrutin censé élever un rempart contre la corruption qui gangrène la classe politique. Mais entre-temps que fait l'Instance chargée par les pouvoirs publics de veiller à ces situations et de rectifier ses dysfonctionnements alors que les législatives comment déjà à avoir peur de l'argent sale? Il a fallu les dénonciations des partis, les pressions des médias pour que le président de la Haute Instance indépendante de surveillance des élections (Hiise), Abdelwahab Derbal, frémisse. Il est sorti hier, de sa réserve par un aveu inquiétant. Il a en effet affirmé sur les ondes de la Radio nationale que les auteurs de ces fraudes et ceux encore impliqués dans le marchandage des candidatures sont débusqués, présentés à la justice et incarcérés. «Nous sommes des alliés des partis politiques qui veulent des élections transparentes, justes et propres, comme nous le sommes aussi pour l'administration qui veut appliquer la loi sur tout le monde». Voilà qui va rassurer et même assurer la régularité d'un scrutin qui traînera ce handicap avant de commencer.