L'Expression

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Le vieux parti tiendra son 11e congrès samedi prochain

Mystères et intrigues au FLN

C'est toujours à travers le prisme de l'intrigue qu'on appréhende les situations dans ce parti.

À 48 heures de l'ouverture des travaux de son onzième congrès, rien n'est encore joué au FLN. Abou El Fadl Baâji, candidat à sa propre succession au poste de secrétaire général, peut conforter sa position, comme il peut être remplacé par un autre profil qui surgira de nulle part. C'est toujours à travers le prisme de l'intrigue qu'on appréhende les situations dans ce parti qui peut s'offrir, haut la main, l'Oscar des retournements et des rebondissements inattendus. En la matière, le FLN post-indépendance est un cas d'école où l'on apprend à cogner, toujours plus fort, encaisser, ruser, se replier et attaquer par surprise.
Pour des scénaristes avisés, il y a matière à une vraie série à rebondissements restituant la tragédie d'un parti qui a concentré tous les conflits qui meurtrissent le pays: rivalités internes, putschs, coups d'État scientifiques, redressements et démissions. Le feuilleton commence en 1962. Auréolé d'une des plus belles, des plus héroïques victoires sur le colonialisme dans le monde, le FLN se saisit du pouvoir et pour s'en assurer l'exclusivité, il instaure le système du parti unique. Mohamed Khider prend les rênes du jeune parti en tant que secrétaire général. À peine une année après l'indépendance, alors que la rébellion des Wilayas III et VI historiques, battait son plein contre le pouvoir personnel de Ben Bella, les premières fissures apparaissent au sein de «l'appareil». Un coup de théâtre survient le 17 avril 1963: Mohamed Khider démissionne et s'exile en Europe. C'est le président Ahmed Ben Bella, également Premier ministre, qui cumule la fonction de secrétaire général du FLN d'avril 1963 jusqu'à son renversement par Houari Boumediene, le 19 juin 1965.

Le bouillonnant Kaïd Ahmed
À Ben Bella succède Cherif Belkacem qui a fait long feu. Né en 1933 au Maroc, Chérif Belkacem était un collaborateur du colonel Boumediene à l'état-major des frontières. Victime d'une cabale, il s'efface en 1967 et quitte totalement la vie politique. Il a été éjecté au profit du bouillonnant Kaïd Ahmed. Ce dernier s'est opposé à la politique de son compagnon de route, Houari Boumediene. Il a osé aller à contresens de la révolution agraire et surtout de la nationalisation des terres agricoles. C'était courir à sa perte que de dire non au tout-puissant Boumediene! La foudre s'abat alors sur Kaïd Ahmed qui tombe en totale disgrâce. Exclu du FLN, il meurt exilé le 5 mars 1978 à Rabat. Vint alors le tour de Mohamed Salah Yahiaoui. Militaire de carrière et arabisant de formation, il a voulu succéder au défunt président Houari Boumediene. Mais les voies du système sont impénétrables. C'est Chadli Bendjedid qui a été adoubé par les décideurs et élu à la tête de l'État en 1979. L'ambition de Yahiaoui ne s'étant toujours pas émoussée, Chadli a vite fait de l'éliminer. Il est remplacé par Mohamed Cherif Messaâdia. Idéologue, politique et militant rompu aux coulisses du parti. Il a eu à gérer, durant son règne, les grands évènements de cette formation avec une poussée politique de l'opposition clandestine très virulente, notamment à l'étranger. Et la noria continue, roule!
Survient brusquement l'explosion du 5 octobre 1988. Le système a été sérieusement ébranlé et le sort de Messaâdia était déjà scellé. Mais le patron incontestable du FLN était loin de se douter d'une disgrâce tant ses appuis étaient solides, pensait-il. Grave erreur d'appréciation dans une phase où les alliances politiques se fissurent, les loyautés sont mises à l'épreuve, et les ambitions personnelles se heurtent à une réalité politique impitoyable. Envoyé à Rabat dans le cadre d'une réunion de l'UMA, le président Chadli lui demande de ramener avec lui l'ambassadeur d'Algérie en poste, un certain... Abdelhamid Mehri. Docilement, Messaâdia s'exécute et se fait accompagner à son retour du Maroc par Mehri. Il venait de signer son arrêt de mort de sa propre main. Alors que l'avion d'Air Algérie atterrissait à l'aéroport, une voiture qui attendait sur le tarmac conduit Mehri directement au siège de la Présidence. L'idéologue n'y a vu que du feu. Il est remplacé au pied levé. Chadli a-t-il vu juste? Abdelhamid Mehri était le mieux indiqué pour rehausser l'image d'un parti qui cristallise toute la colère d'une population qui s'est sentie trahie par les pratiques du parti après les émeutes du 5 octobre 1988.

Mehri se rallie à Hocine Ait Ahmed
On est en 1992, l'Algérie organise les premières élections législatives libres de son histoire. Terrible gifle pour l'ex-parti unique. Désavoué, humilié, il se classe en troisième position, loin derrière le FIS dissous et le FFS de Hocine Ait Ahmed. Le mythe du parti invincible vient de tomber. En attendant, on arrête le processus électoral et l'Algérie sombre dans la folie meurtrière. le terrorisme islamiste fait rage et le FLN, pour la première fois de son histoire, bascule dans l'opposition. Abdelhamid Mehri, qui s'est rallié à Hocine Ait Ahmed, met le pouvoir de l'époque dans une posture très gênante. Au système, on ne pardonne pas pareils écarts. Erreur fatale. Abdelhamid Mehri doit payer pour «ces mauvaises fréquentations».
Dans les laboratoires on pèse, on soupèse, on ajuste les dosages jusqu'à ce que jaillisse dans les éprouvettes «le coup d'État scientifique». Une belle trouvaille politique dont seul le FLN détient à ce jour le secret. Avant même de digérer la potion, Mehri est déjà évincé pour retrouver à sa place le fade Benhamouda. Il passe à la tête du FLN sans grand relief. Affalé dans son fauteuil de SG, il a oublié que le vieux parti est une machine qui broie sans cesse. Elle carbure aux cadavres fussent-ils ceux des caciques. Ali Benflis, jeune avocat et ambitieux le débarque sans tambour ni trompette. Pousse-toi que je m'y mette. Il se saisit des rênes du parti de 2001 à 2003, et pour la première fois il lui redonne sa majorité au Parlement. Grisé par cette euphorie du succès, Benflis caressait le rêve légitime de devenir Président. «Pourquoi pas moi!», se disait-il fort de cette légitimé populaire. L'homme est trop pressé.
Chauffé à blanc, il franchit le Rubicon sans viatique consistant et l'ex-président Bouteflika l'exécute sans état d'âme. Il actionne la justice qui siège de nuit, une première dans l'histoire du pays, et invalide le congrès extraordinaire du parti qui donnait un quitus pour Benflis à se porter candidat à la présidentielle d'avril 2004. Au suivant! Belkhadem s'installe au poste de SG de 2005 à 2013. Les crises s'empilent, s'accumulent, un mouvement de redressement en chasse un autre et le patron du parti chavire une première fois quand les révoltes arabes portaient les islamistes au pouvoir. Au second dérapage, il se fait éjecter lui aussi par un mouvement de redressement. Au FLN on élimine soit avec une dague et un sourire, soit d'une balle entre les yeux avec un silencieux de préférence. Belkhadem n'y échappe pas. Radié d'un trait de plume des rangs du parti par l'ex-président Bouteflika, il disparaît des radars de la vie politique. Et voilà le bulldozer Amar Saâdani qui arrive avec fracas et vrombissements. Il descend dans la cage aux lions. Le sale job étant accompli, Saâdani est poussé à la porte comme un malfrat. Il rend le tablier en octobre 2016 et finit en exil lui aussi au...Maroc. On sort du chapeau le grotesque clown Djamel Ould Abbès pour amuser une galerie dégarnie d'un parti à bout de souffle. Le spectacle de mauvais goût a duré deux ans, jusqu'à novembre 2018, Ould Abbès se voit débarqué de son poste sans grand bruit au motif de maladie. Mystère et boule de gomme. C'est l'inconnu Bouchareb qui lui succède. Suffisant et imbu de sa personne, il s'est lancé dans des diatribes injustifiées pensant donner du relief à une scène politique totalement vitrifiée sous l'ère Bouteflika. Peine perdue.

Dans la jungle politique
Il sera lui aussi éjecté, humilié et vomi par le Hirak populaire. Le FLN est une école ou l'on apprend que dans la jungle politique, les cadavres ont un goût succulent. Bouchareb a été achevé d'un coup de poignard avant d'être piétiné par son «ami», Mohamed Djemaï placé depuis longtemps à l'affût. Djemaï reprend les mêmes allures d'arrogance au point d'accuser tous les habitants de Tébessa, sa région natale, de contrebandiers. Il se dit clean, propre, réfutant toute idée de corruption à son encontre. La justice le rattrape. Son immunité parlementaire a été levée et le voilà en prison où il retrouve un autre SG du parti, Djamel Ould Abbès. Après Djemaï, c'est Abou El Fadl Baâdji qui lui succède dans un contexte très particulier. N'ayant plus l'oreille du président, le parti se fait discret et s'applique la technique du roseau: courber l'échine le temps que la bourrasque passe.
On en est déjà au quinzième secrétaire général et la saga du FLN continue. Elle ne s'arrêtera jamais...

De Quoi j'me Mêle

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