L'Expression

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SCANDALE(S), RECUEIL COLLECTIF DE NOUVELLES PAR HUIT AUTEURS

Quand la chose atteint les sens...

... resterait-il encore un sens assez puissant pour ne pas attirer autre «chose»?

Aussi, pourrait-on se demander à quoi sert la littérature et si même elle aide vraiment à comprendre quand, dans l´urgence, on exige d´elle qu´elle enseigne. Éternel sujet ´´bateau´´ de littérature (ou de philosophie). Et, pareillement, «Morale» ou «Civisme» sont-ils des valeurs idéales à mettre ou à remettre en place pour gérer une «chose» qui heurte la bonne vie sociale? L´une des originalités de la littérature algérienne actuelle ne serait-elle pas justement d´éduquer et instruire? J´en ai ici bien le sentiment, car l´ouvrage Scandale(s) (*), qui réunit huit auteurs chacun proposant une nouvelle, me semble avoir été conçu dans l´esprit de donner à observer des faits de la vie sociale au quotidien et dont certains peuvent contribuer - au-delà du message littéraire et esthétique - à la formation, sinon à la conscientisation, du citoyen.
Il me paraît naturel, alors, que l´éditeur insiste sur la signification de ´´scandale´´ en tant qu´unité lexicale, tout en précisant que, dans l´ouvrage en question, «Scandale(s) est également le prétexte à un exercice de style, une contrainte littéraire, un moteur créatif qui inspire huit auteurs: Aziz Chouaki, Y.B., Rachid Mokhtari, Kamel Daoud, Wahiba Khiari, Chawki Amari, Ali Bécheur et Minna Sif.»
Le thème de «scandale», saisi dans son acception courante, fait l´objet du genre «nouvelle» écrite, à partir de situations différentes, par les auteurs cités et classés dans le recueil par ordre alphabétique. Au début de chaque nouvelle, une brève notice situe l´auteur et ses oeuvres. On constate bien que les objectifs de l´éditeur sont nettement définis et que les intentions des auteurs sont, à l´évidence, nécessairement soignées eu égard au genre littéraire adopté par chacun d´eux sans rien concéder de l´intensité du scandale, chose essentielle abordée et explicitée. Donner à voir le scandale et, si possible, l´analyser serait donc une action éducative et, indubitablement, chaque nouvelle, ici, aurait la vocation de la classique leçon de choses,...de morale ou d´instruction civique.
Après tout, pourquoi pas? D´autres éditeurs, d´autres auteurs, en d´autres lieux, en d´autres temps, se sont exercés à cette démarche avec succès pour éduquer et tout franchement pour éveiller les consciences. Si le vocable scandale a un sens «formidable» - puisqu´il vise le «péché» dans toutes les situations humaines morales, religieuses, philosophiques, civiques, politiques, professionnelles - il développe le sens du devoir de dire.
Si je ne me trompe pas trop sur ces «leçons de choses» en les considérant comme des «sermons cachés», un extrait du fameux Sermon sur le Scandale de Bourdaloue (lui qui nous est complètement étranger) nous éclaire a contrario davantage (mais en en faisant l´indispensable transposition) sur les tenants et les aboutissants de la réalité vraie d´aujourd´hui décrite par nos auteurs s´adressant à nous tous. «... Car, disait ce prédicateur français de l´ordre des Jésuites du xiie siècle, c´est par vos sollicitations que votre frère s´est perdu; c´est par vos discours licencieux que la pureté de son âme a été souillée; c´est vous qui, par vos erreurs et les détestables maximes de votre libertinage raffiné, lui avez gâté l´esprit... [...] C´est vous qui l´avez dégoûté de ses devoirs [...]; s´il s´est engagé dans vos voies corrompues, c´est par la liaison qu´il avait eue avec vous; s´il s´est livré à toutes ses passions, c´est par la fausse gloire qu´il s´est faite de vous imiter; s´il a contracté tous vos vices, c´est par le désir de vous plaire. [...] Voilà, dit Dieu dans son courroux... [...] Vous avez fait de cet homme un impie [...] Il me demandera justice contre vous, et quelle sera votre défense?...»
Toutes les nouvelles produites par nos huit auteurs sont de valeurs littéraires égales, chacun traitant de son substantiel «scandale» librement. Heur, humeur, humour, vont bon train, souvent avec fantaisie (Les Soeurs de la Rédemption de Minna Sif), avec indignation (Le Petit Pois de Aziz Chouaki), avec colère contre les hypocrites de la religion (Dieu dans une bouteille de Kamel Daoud), avec la sensibilité du coeur et la conscience professionnelle du journaliste (Parcs de Rachid Mokhtari) ou avec l´excessive rigueur du juste et l´ironie assassine du schizophrène qui, pourtant, déclare: «J´aime l´humanité...Telle que je la rêve.» (Roberto, le Scandaleux de Y. B. [Yassir Benmiloud])...Il y a tant de choses à mettre à plat! Qui pourrait s´en saisir?
Le liant assurant la cohésion de ces huit nouvelles n´est pas innocent...Il court, chez nous, le murmure de la génération nouvelle sur son désir d´avancer, de progresser, de se développer, d´être utile à toutes les grandes espérances que programme son pays...
À tout cela ne manquerait-il pas le Devoir de respecter? Sans doute, mais quoi! Respecter, être honnête, être juste, serait-il devenu scandaleux?...Écrire un livre sur le respect de l´autre confirmerait-il l´illégalité du scandale chez nous? Utopie? Tiens, donc!

(*) Scandale(s) de R. Mokhtari, W. Khiari, C. Amari, K. Daoud, A. Chouaki, A. Bécheur, M.Sif, Y.B., Chihab-Éditions, Alger, 2010, 176 pages.

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