Force, justice et politique
Zerhouni, finalement, ne collectionne pas les bévues. Il sait parfaitement ce qu´il dit et ce qu´il fait. Il reste un parfait «homme d´Etat», au service de son président, même dans ses sorties les plus intempestives, et pour tout dire «incomprises». Il ne fallait s´attendre à rien moins que ce qu´il a dit hier depuis que son ministère s´est constitué partie civile dans la plainte déposée par «le mouvement de redressement du FLN» contre Ali Benflis, secrétaire général «en titre» du FLN. Sa sortie, au contraire, a au moins le mérite de la clarté. Celui qui a en charge le respect des lois et la prévention des troubles à l´ordre public a clairement signifié que le congrès bis, huitième du nom, aura lieu quelle que soit la décision que rendra la chambre administrative d´Alger. Il est vrai que la sortie de Zerhouni intervient au lendemain de celles d´un Belkhadem chauffé à bloc à travers ses sorties sur le terrain, et l´annonce on ne peut plus claire que le mouvement s´inscrit en droite ligne du soutien à un second mandat de l´actuel président de la République. Si les «redresseurs» doivent avoir conscience dans leur for intérieur qu´ils vont droit dans le mur en menaçant de diviser irrémédiablement le FLN, avec les graves conséquences pouvant en découler sur la stabilité des instances élues de la République, il reste que nous risquons aussi de voir le conflit dégénérer en troubles sévères dans les rues et ruelles du pays. Un avant-goût, déplorable s´il en est, nous en avait été donné dans un premier temps, au début de l´été, à la suite des attaques dont avaient été victimes des sièges locaux du parti, puis, dans un second temps, des tentatives qui étaient opérées par les éléments fidèles à Benflis pour empêcher les regroupements des hommes de Belkhadem. Des avocats de la défense, à partir de la très auguste barre des plaidoyers, avaient évoqué de pareils scénarios-catastrophes. Le Rubicon est désormais franchi. La machine s´est bel et bien emballée. Rien, ni personne, ne saurait arrêter les uns et les autres. Les sénatoriales, véritables primaires dans ce combat de titans, interviendront le jour du verdict que devrait rendre la justice. Mais déjà plus personne ne s´occupe de celle-ci. Son verdict est ignoré par ceux-là mêmes qui y avaient eu recours. La force, absurde et aveugle, est mise au service de la politique, sans que la justice ait plus un quelconque mot à dire. La boîte de Pandore est ouverte. Gare aux conséquences et aux jugements impitoyables du peuple et de l´histoire.