IL PRONONCERA UN DISCOURS, AUJOURD’HUI, AU PALAIS DES NATIONS
Bouteflika face à la détresse juvénile
Tous les sentiments de tristesse et de détresse, de désespoir et de colère qui pesaient sur cette jeunesse ont été exprimés sans le moindre écho.
Au terme de deux jours d´ateliers qui ont regroupé, à huis clos, les walis autour du thème de la jeunesse, les commis de l´Etat assisteront aujourd´hui, avec une assiduité d´écolier, au discours du chef de l´Etat.
Un discours que d´aucuns annoncent déjà comme le détonateur d´une solution pour la jeunesse algérienne. Soit, mais on peut toujours déplorer pourquoi les autorités algériennes ont attendu presque 20 ans après les événements d´Octobre, pour consacrer une session gouvernementale à cette catégorie de la société? Mais Octobre est trop loin et les mémoires sont souvent courtes. Dans un passé récent, c´est-à-dire depuis l´année 2000, la jeunesse algérienne n´a cessé d´émettre des signaux d´alerte. Les cris de désespoir ont retenti d´abord en Kabylie, au printemps de l´année 2001, pour se propager ensuite à tout le territoire national. La colère a prévalu et des émeutes ont éclaté dans les moindre recoins du pays. Tous les sentiments de tristesse et de détresse, de dégoût et de désespoir, d´angoisse et de colère qui pesaient sur cette jeunesse, ont été exprimés sans le moindre écho. Si bien que cette frange de la société n´arrive pas à se réaliser dans son pays.
Pour le constater, il ne faut pas sortir de Saint Cyr: exil volontaire au Canada et aux Etats-Unis pour ceux qui ont un bagage intellectuel. D´autres, bon an, mal an, trouvent le moyen de rejoindre l´Europe de manière légale ou illégale. Le plus déplorable est la dernière version du ras-le-bol, à savoir le phénomène des harragas. Après la colère, la place est à la rage.
Une rage destructrice et finalement suicidaire. Au péril de leur vie, sur des embarcations de fortune, des jeunes Algériens vont à la quête d´horizons plus cléments. Vue sous cet angle, l´Algérie a atteint le fond. On peut faire aujourd´hui le constat qu´entre la jeunesse des années 80 et celle de 2007, le fossé est grand. On découvre, ahuris, que l´Algérie des années 80, qui ne connaissait pas le phénomène de la drogue, est passée du statut de pays consommateur à celui de pays producteur. La révolte contre l´Algérie des paradoxes, à la fois pauvre et riche, ne s´arrête pas à ce constat.
Le drame est poussé à son paroxysme. Devant l´absence totale des autorités, des jeunes Algériens obéissent à des ordres qui sortent des grottes afghanes où se terre Ben Laden et vont se transformer en kamikazes. Le raccourci peut sembler trop rapide, mais il s´agit bien d´un laxisme dont font montre les autorités en direction de cette jeunesse. Questions: mais pourquoi est-ce donc au lendemain des suicides et à la veille du départ incessant des embarcations de fortune que nos responsables se posent la question sur le sort de cette jeunesse? Et puis, n´est-il pas trop tard pour se pencher sur une problématique alors que toutes les portes sont fermées devant cette même jeunesse?
Il y a une année, le président Bouteflika reconnut lui-même qu´il est plus facile d´être reçu à la Maison-Blanche que par un wali. Il y a quelques jours encore, on croit savoir que le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, a adressé un courrier au président de la République dans lequel il dénonce les agissements de certains de ces commis de l´Etat.
Quand un chef du gouvernement se dit bloqué par un wali et s´en remet au chef de l´Etat et qui lui-même reconnaît l´existence de blocages, alors il ne reste plus grand-chose pour le simple et jeune Algérien. Et dans ces cas, que peut faire un discours dont l´impact sera oublié une fois les membres du gouvernement et les walis eurent quitté le Palais des nations?
Que faut-il faire alors? Conforter et amplifier le virtuel succès de l´économie algérienne ou s´inscrire dans cette logique d´autodestruction comme s´il s´agissait d´une fatalité? Ni l´un ni l´autre.
Il s´agit de rechercher des idées fortes de participation et de décentralisation. Le point de départ serait de revenir aux actions locales et d´établir des stratégies d´actions possibles à réaliser par le dépassement. «Il n´y a pas de territoires sans avenir, il n´y a que des territoires sans projets», disait en substance un ministre algérien.