«Gaz : une approche stratégique est nécessaire»

L'Expression: Quelle évaluation faites-vous des résultats issus du Forum international des pays exportateurs de gaz, (Gecf)?
Souhil Meddah: En rappelant les divers contextes entourant cet évènement mondial, que ce soit par rapport à l'expérience algérienne dans la production et l'exportation du gaz, les évènements géopolitiques internationaux influençant l'équilibre entre l'offre et la demande, avec le rôle du Gecf, cette organisation abritant des membres influents, notamment en Afrique, l'Algérie cherche à favoriser une approche stratégique dans le commerce du gaz.
Une approche a priori, vise à établir des relations contractuelles à long terme, à partager les risques et les intérêts, et à promouvoir des investissements à moyen et long termes, plutôt que de dépendre exclusivement des marchés de spot avec leurs fluctuations de prix imprévisibles, tout en notant au passage que ce marché spot demeure et demeurera une option omniprésente dans tous les cadres commerciaux et d'échanges présents et futurs.
Le sommet d'Alger a mis en avant l'engagement des pays exportateurs de gaz de surpasser les obstacles à l'investissement dans les projets du domaine gazier, notamment pour faire abstraction aux effets géostratégiques nuisant qui peuvent s'annoncer au détriment d'une force de reprise rapide en cas d'incidents importants ou majeurs.
Cette position souligne l'importance d'un environnement propice et régulier aux capacités d'investir et de produire dans les zones de ressources stratégiques pour assurer une couverture d'une croissance constante dans le domaine et répondre régulièrement à la demande mondiale croissante sans interruption ou volatilités frappantes des flux ne soient enregistrées. Afin que tous les aspects clés qui incluent la stabilité du marché soient au même rythme de la croissance mondiale dans ses différentes phases, avec report des ressources mises à disposition pour chaque prévision de rythme et, pour conforter favorablement la compétitivité internationale, de l'infrastructure gazière et du cadre réglementaire mondial.
Ajoutant que la dernière Déclaration d'Alger confirme de l'engagement des membres du Gecf à créer des marchés constamment équilibrés et fiables à travers les circuits déjà existants ou en cours d'extension pour raccorder continuellement les zones offreuses aux espaces de la demande quelles que soient leurs cadences ou leurs volumes, avec la nécessité d'une coopération internationale qui engage les acteurs des deux parties dans les efforts de l'investissement et du partage des risques et des responsabilités. La volonté étant, d'assurer la stabilité énergétique mondiale par un schéma régulier en fourniture, un équilibre constant en prix et un soutien partagé en l'investissement.

Pensez-vous que le marché gazier international se dirige vers l'émergence d'une organisation telle que l'Opep?
Toutes les volontés se dirigent vers cette conception organisationnelle structurante. Cependant, il est assez particulier de compter sur une structuration imminente des acteurs du marché gazier de manière réactive qui regroupe et engage des acteurs différents dans des zones qui partagent des avis distincts sur les questions géopolitiques.
Toutefois, il existe quelques facteurs qui restent à prendre en considération pour l'évaluation d'une telle possibilité. D'abord sur la croissance de la demande de gaz qui devrait continuer de croître, en particulier en raison de son utilisation croissante dans la production d'électricité, de la transition énergétique et de la demande croissante dans certains secteurs industriels. Cette croissance pourrait stimuler la nécessité d'une coordination entre les principaux exportateurs de gaz pour stabiliser les marchés et influencer les prix et aussi, pour une bonne reconfiguration des zones selon la formulation de leurs demandes permanentes ou par volatilités intermittentes.
Ensuite, la question de la concentration de quelques exportateurs caractérisée par la complexité du marché des exportations gazières, sachant que le marché du gaz est souvent plus complexe en raison de la diversité des méthodes d'exportation en gazoducs ou en GNL, des prix indexés sur des contrats à long terme et des différences régionales dans les schémas de consommation.
Et enfin, sur les quelques tensions géopolitiques entre les pays exportateurs de gaz, ainsi que les rivalités régionales, qui occasionnellement pourraient influencer la volonté et la capacité des pays à coopérer au sein d'une organisation similaire à l'Opep.

Quelles sont pour vous les éventuelles répercussions sur l'économie nationale?
Les éventuelles répercussions sur notre économie par l'émergence d'une organisation pour les pays exportateurs de gaz naturel similaire à l'Opep pourraient devenir significatives avec le temps et pourraient largement dépendre de la ligne stratégique dont l'Algérie choisirait de s'y engager à terme, ainsi que des conditions spécifiques par rapport auxquelles le marché gazier international va évoluer en termes de part de marché, de repositionnement des capacités de ressources, face à la constance de la demande. Il s'agit entre autres de l'influence sur les revenus d'exportation, tout en rappelant que l'Algérie demeure l'un des acteurs clés et l'un des principaux exportateurs de gaz naturel par rapport au domaine de corporation organisée.
Notons au passage que certains pays comme les USA qui n'assurent que moins de 10% des réserves au monde, emploie des stratégies d'approche et de pénétration axées sur des approches géopolitiques, différentes aux règles commerciales relatives aux méthodes des autres pays exportateurs, qui détiennent des capacités plus importantes. Une telle organisation dédiée au domaine du gaz pourrait en parallèle aider des économies en voie de développement telle que la nôtre à stabiliser les prix et à maintenir des revenus d'exportation stables.
Cela dépendrait également de la capacité des pays qui appartiennent à l'organisation d'influencer structurellement le marché mondial du gaz et ses axes prépondérants.
Également, il s'agit de l'impact sur les investissements sachant que toutes les actions corporatives engagent avec elle des objectifs d'encourager et de façon continue les investissements dans l'exploration et la production de gaz, notamment en Algérie, en offrant un environnement plus stable, plus prévisible et anticipatif pour les acteurs opérant dans le secteur gazier.
Et en misant que les conditions de coordination des politiques énergétiques plus étroites afin d'influencer les décisions internationales en matière de partage en zones stratégiques et nationales en matière d'exploration, de production, de répartition interne et d'exportation de gaz.
Enfin, il est également question de comment renforcer les relations avec les autres pays exportateurs de gaz en cherchant à influencer les dynamiques géopolitiques régionales et internationales, tout en captant au passage les occasions qui permettent les défis et les opportunités pour la diversification économique intérieure soutenue par les revenus des exportations en énergies fossiles et autres produits ou services connexes.

Quelles sont pour vous les opportunités de développer une industrie susceptible de renforcer la position de l'Algérie sur le marché?
Il existe potentiellement plusieurs opportunités pour renforcer la position de notre économie sur le marché gazier international en développant son industrie gazière.
D'abord à travers une diversification palpable sur les matières proposées aux exportations, soit par le développement de nouvelles infrastructures gazières, ou par la diversification des formules diverses. Des formules qui peuvent s'adapter aux canaux dédiés aux marchés spot comme aux marchés à terme.
D'autre part, avec les vastes ressources gazières inexploitées dont dispose l'Algérie, il devient impératif de souscrire sur des plans d'investissement à moyen et long terme dans l'exploration et la production de gaz, avec l'amélioration de l'efficacité opérationnelle, en modernisant les installations gazières et en améliorant l'efficacité des chaînes d'approvisionnement et de production.
Le tout avec des partenariats stratégiques qui peuvent inclure à la fois les forces productrices similaires ou les partenaires détenteurs de technologies ou de demandeurs de ressources en gaz naturel conventionnel ou non conventionnel, sans omettre l'utilité d'optimiser la consommation sur le marché intérieur et la transition vers le gaz renouvelables sous ses différentes formes.