VERITABLE FLEAU
La fausse monnaie finance le crime organisé
L’Afrique et plus particulièrement les pays nord-africains constituent les points de passage pour les réseaux de fausse monnaie.
Tous les jours que Dieu fait, les services de sécurité font état d´arrestation d´immigrants clandestins de différents âges et sexes. Leur reconduction aux frontières génère de lourdes pertes financières aux caisses algériennes. Les enfants accompagnant certaines ne sont pas pris en charge par l´Etat et subissent malheureusement «les contrecoups d´une aventure périlleuse entreprise par leurs parents à la recherche d´une vie meilleure». Tamanrasset, capitale du Hoggar, constitue depuis des années le lieu de transit d´une immigration clandestine difficile à maîtriser et entraînant une prolifération de la prostitution, une propagation du sida, ainsi que la falsification de documents officiels et la circulation de fausse monnaie. Les clandestins sont appréhendés non seulement à proximité des frontières maliennes ou nigérianes mais aussi à Alger ou à proximité des frontières marocaines ou tunisiennes et où ils espéraient traverser la mer Méditerranée à destination des pays européens. Ces immigrés, fuyant la pauvreté et la guerre dans leur pays, transitent par des villes du Sud algérien. Durant l´année, des milliers d´Africains transitent par le Sud, dont les frontières sont immenses avec la Mauritanie, le Niger et le Mali, pour remonter vers le nord du pays et essayer de rejoindre l´Europe, via le Maroc et l´Espagne. Pour amasser l´argent du voyage, ils vivent d´expédients, de travail au noir, parfois de prostitution et de trafic de drogue ou de fausse monnaie. Cette immigration est favorisée, selon des juristes, par «l´inexistence (en Algérie) de textes juridiques réprimant l´immigration clandestine». Selon ces juristes, le seul texte date de 1966 et est encore appliqué. Tous les observateurs se sont accordés à dire que l´immigration clandestine d´origine africaine menace dangereusement l´économie algérienne au travers du déversement de grandes quantités de faux billets de divers pays et menace aussi la santé publique au travers de l´introduction du VIH. Si la fausse monnaie, fabriquée dans certains pays africains, et la prostitution à laquelle se livrent des Africaines - un vecteur de propagation du virus en Algérie et en d´autres pays -, il est une certitude que la fausse monnaie, qui dans bien des cas est recyclée à travers des phases pour son blanchiment, constitue le corollaire par excellence de toutes les organisations criminelles en l´occurrence le terrorisme. Certaines sources sécuritaires précisent que «toutes les opérations d´achats d´armes sont effectuées grâce à la contribution de faux monnayeurs». En d´autres termes, la fausse monnaie constitue le meilleur moyen de financement du trafic de drogue et surtout du terrorisme. Bien souvent, le lien a été établi lors de démantèlement de réseaux terroristes ou autres et où des disques durs d´ordinateurs démontraient les intentions de «mettre en place en Algérie de véritables usines de fabrication de faux billets algériens et étrangers». Des milliers de victimes ont été bernées par la perfection avec laquelle les réseaux fabriquent les monnaies. Des ordinateurs et les accessoires d´imprimerie, dont l´acquisition n´est pas contrôlée et ne sont pas cernés par des textes juridiques, sont souvent saisis à la suite de démantèlement de réseaux.
Les services de sécurité font des efforts considérables pour l´arrestation et le démantèlement des réseaux de fausse monnaie introduits la plupart du temps par les immigrés clandestins. Aguerris dans la chasse aux informels, les services de sécurité savent que les autres réseaux de drogue, de prostitution ou de trafic en tout genre, sont intimement liés. Ils savent surtout que ce phénomène constitue le principal financement des groupes terroristes. Il va sans dire que certains réseaux sont composés d´Algériens relayés par des complices en Algérie et à l´étranger. Bien que le matériel informatique qui a servi à la contrefaçon de billets soit saisi, à aucun moment, ni la justice ni les forces de sécurité n´ont réussi à déterminer les sommes qui ont été mises en circulation. Si des milliers de personnes ont eu le réflexe de se diriger vers les services de sécurité pour dire avoir reçu des billets de 200, 500, 1000 dinars ainsi que diverses monnaies étrangères, d´autres, par contre, ont eu des réticences «de peur des procédures judiciaires et de leurs conséquences». Le silence de ces dernières victimes rend impossible toute estimation des faux billets mis en circulation. Il convient de dire que dans la plupart des cas, l´apparition de faux est constatée dans les zones sahariennes confirmant indéniablement sa provenance des pays africains où pullulent les ateliers clandestins. Des réseaux bien installés ont été signalés au Bénin et au Togo, au Tchad et au Mali. Pour rappel, il faut signaler que l´opération de faux-monnayage de dinars de Bahreïn, pour un montant de quelque 2 milliards de FF, pilotée par Hicham Mandari, avait ses sources en Afrique, plus précisément entre le Tchad et le Mali.
L´opération, qui devait se dénouer à Paris, avait transité par une nuée d´intermédiaires fréquentant les cercles du pouvoir à N´Djaména (Tchad) et à Bamako (Mali). A Alger et autres grandes villes, bien des entrelacements ont été démantelés et leurs auteurs durement réprimés en vertu des lois de la République et des textes du code pénal. La justice a eu à traiter plus de 500 affaires relatives à la fausse monnaie.
Pour bien des cas, le ministère Public a requis la peine capitale en application de l´article 197 du code pénal pour des accusés reconnus coupables de crime contre l´économie nationale. Ces sanctions n´ont pas découragé la constitution de réseaux qui plus est, «prennent des proportions transnationales». Certaines sources bien informées ont indiqué la présence de faux billets dans les caisses de certaines banques qui, au passage et pour une bonne partie d´entre elles, ne sont pas dotées de détecteurs de faux billets. Néanmoins, la justice, se basant sur les articles du code pénal, a fortement condamné moult auteurs mais n´a pas empêché la reconstitution de nouveaux réseaux composés d´Algériens qui mettent à profit la fragilité de la situation sociale de certains chômeurs pour les enrôler. Les multiples réseaux sont interconnectés. Le trafic de véhicules (volés ou importés d´Europe) bénéficie souvent de l´apport financier en «monnaie de singe». L´exemple du réseau démantelé par les services de police d´Alger et présenté pour trafic de monnaie algérienne et étrangère est un exemple édifiant. Pour ce réseau, il est fait état «de l´envoi des faux billets d´Italie», confirmant les ramifications a l´étranger. Un des «créneaux» des faux-monnayeurs est la falsification de documents officiels, pour la plupart appartenant à des institutions de l´Etat. Ces documents auraient pour but de faciliter les transactions et l´introduction des véhicules sur le territoire national. Pour mieux illustrer ce phénomène et ses ramifications transnationales, nous citerons l´arrestation des trafiquants à l´aéroport de Casablanca en provenance d´Abidjan et en possession de deux milliards en faux dollars. Certains observateurs sont convaincus que la main de la mafia n´est pas étrangère à ces opérations. Cela dit, il est une certitude aujourd´hui que le Maroc, la Tunisie, mais surtout l´Algérie, sont devenus des points de passage privilégiés pour le trafic de fausse monnaie. «Une grande partie est réservée aux réseaux en Afrique pour l´achat d´armes». Selon un rapport de l´Association nationale des commerçants italiens publié l´année dernière, la mafia, et plus précisément la Camorra napolitaine, se procure, contre des faux dollars, «de grosses quantités de drogues», de la Russie et du Maroc en passant par l´Afrique du Sud.
En général, les contrefaçons sont faciles à reconnaître. Les faux billets sont le plus souvent de qualité médiocre. Dépourvus des deux éléments de sécurité essentiels que sont le filigrane et le fil métallique, ils sont donc faciles à reconnaître. En outre, la couleur de certaines contrefaçons est très différente de celle de l´original et le billet donne, au toucher, une impression de mollesse, alors qu´il devrait être rugueux. Pour reconnaître les fausses coupures, il suffit donc, étant donné la mauvaise qualité des contrefaçons, de les examiner rapidement et d´être attentif à la sensation que procure le billet au toucher. En cas de doute, on comparera le billet proposé avec une vraie coupure. En clair, il faut être attentif au filigrane, au fil de sécurité, au changement de couleur, à la gravure et au motif de -trans-vision-, ce qui signifie que l´image doit être parfaitement identique des deux côtés, rectangle sur rectangle. Les inscriptions des différentes banques nationales sont imprimées en relief au recto des billets de banque, de manière palpable. Les billets sont en général imprimés sur papier en coton pur, ce qui les rend différents au toucher. Il est important de ne pas se baser sur un seul aspect. Un billet peut être falsifié de telle sorte qu´un seul signe de sécurité soit bien contrefait, mais il est impossible qu´il en soit de même pour tous les autres signes du billet. Mettre en circulation un faux billet équivaut en principe à commettre un fait punissable, sauf si un billet est donné par quelqu´un ignorant qu´il s´agit d´un billet contrefait. En tout cas, un faux billet doit être immédiatement remis soit aux services de police, soit à la banque. Le billet incriminé fait l´objet d´un procès-verbal, d´une saisie et d´une analyse. On vérifie grâce au procès-verbal si des faits similaires ont été commis ou si la falsification provient éventuellement de la même source.
La police colombienne avait, l´année précédente, démantelé à Medellin un important réseau de faux-monnayeurs qui opérait dans ce qu´elle a appelé la «plus grande imprimerie de fausse monnaie du monde». Treize personnes ont été arrêtées et de grosses sommes d´argent ont été saisies, notamment 250.000 dollars américains, quatre milliards de pesos colombiens et deux milliards de bolivars vénézuéliens. Le complexe, situé dans le centre de Medellin, à 430 kilomètres de Bogota, fabriquait chaque mois un million de dollars, deux milliards de bolivars et quatre millions de pesos. Les faux billets étaient pratiquement impossibles à distinguer des vrais. Les faussaires arrivaient à tromper bien des gens en confectionnant des billets qui frôlaient la perfection. Selon les services de sécurité, «la plupart des faussaires étaient répertoriés et les données sont transmises à diverses polices étrangères». Cette collaboration des polices du monde a permis le démantèlement de filières et autres usines de fabrication. Les douanes ont joué un rôle important dans la lutte contre cette forme de criminalité. Le phénomène de la fausse monnaie n´a pas épargné la France et ce, depuis bien des années où le franc était en circulation. En juillet de cette année, très exactement le 17, les services douaniers de Paris-Est ont été remerciés par un ministre délégué français pour l´importante saisie de fausse monnaie. A 22h, les agents des douanes ont procédé au contrôle d´un véhicule en provenance de Suisse, au péage des Eprunes, sur l´autoroute A5. La fouille du véhicule a révélé la présence de plus de 5000 billets de banque: 29.000 francs suisses, 10.000 euros et 100.920 dinars de Bahreïn, représentant une contre-valeur totale de 251 526 euros. Après expertise, les dinars de Bahreïn se sont révélés être des faux d´excellente facture, trahis uniquement par la qualité du papier. Ils représentent une contre-valeur de 201.840 euros.
Une enquête est en cours à l´Office central de répression du faux-monnayage pour déterminer leur provenance et neutraliser les auteurs. Le phénomène de la fausse monnaie prend des proportions inquiétantes à travers le monde. Cette réalité a conduit bon nombre de pays à prendre des mesures pour la sécurisation de leurs monnaies respectives. Des précautions que l´Algérie devrait prendre afin d´éviter le pire.