L'Expression

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Témoignage d'un ancien lyceén

Quand Yacef Saâdi nous reçut en 1956...

L'Algérie aura besoin de vous après l'indépendance, continuez vos études.

Alors que les étudiants universitaires algériens répondaient en masse, en 1956, à l'appel de la nation pour rejoindre les rangs de la révolution armée dans les maquis, nous, trois lycéens «arabes», comme se plaisaient à nous appeler nos camarades de classe pieds-noirs du lycée Bugeaud (actuellement Lycée Emir Abdelkader), décidions de contribuer concrètement à la lutte armée que menaient nos aînés dans les djebels. Après mûre réflexion, qui n'en était pas vraiment une, car notre détermination était «irréversible», nous n'en avions même pas parlé à nos parents ni à quiconque, nous prîmes l'ukase d'aller voir Yacef Saâdi pour nous accueillir dans ses rangs armés. Etant natif et habitant la Casbah d'Alger, je fus chargé des premiers contacts qui furent aussi aisés que difficiles. Faciles, parce que tout un chacun à la Casbah connaissait un des «khaoua» (frères), vocable pour désigner un militant dans l'intimité, mais difficile aussi car, pour rencontrer un «chef», ce qui n'était pas si facile que ça, alors là, pas du tout, au vu du secret qui entourait les activités de ces militants. Cependant, après maintes transactions et insistances auprès de certaines personnes contactées, qui ont dû, certainement, mener une enquête minutieuse sur nous, rendez-vous impromptu fut pris et nous pûmes nous rendre à la rue des Abderrames (Casbah) où nous fûmes reçus tous trois par un lieutenant de Saâdi qui nous conduisit vers son chef. Nos genoux flageolaient devant cet honneur indescriptible pour nous adolescents, «tout frais qui venions à la vie». Après notre demande, formulée maladroitement, en bégayant quelque peu, Yacef Saâdi se leva alors, nous félicita chaleureusement pour notre courageuse initiative avant de couper court à notre noble voeu, tel un couperet, en prononçant un «NON» presque catégorique, enrobé toutefois d'un sermon politique enhardi, mais néanmoins «mielleux», sur un ton de sagesse et de conviction politique d'avant-garde avérée. Le compagnon de Larbi Ben M'hidi nous expliqua alors, solennellement, que «l'Algérie aura besoin de vous après l'Indépendance. Continuez donc vos études avec persévérance pour mieux servir votre pays à cette échéance.»Cette réponse intelligente et pleine de militantisme nous glaça les veines et nous comprîmes, alors, la valeur du «comment servir notre pays». Tout penauds, nous baissâmes la tête, les yeux larmoyants, tout en le remerciant pour sa sagesse et en lui promettant d'être meilleurs dans nos études. C'était, pour nous, une adhésion déjà au combat libérateur lancé un certain 1er Novembre 1954. 

De Quoi j'me Mêle

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