COUP D’ÉTAT AU NIGER
La junte obtient un soutien massif dans la rue
«Merci de nous avoir délivrés de la dictature!» lançaient les manifestants à des soldats.
Deux jours après le coup d´Etat au Niger, des milliers de personnes ont manifesté hier à Niamey leur soutien aux militaires putschistes qui ont promis de «restaurer la démocratie» malmenée par le président renversé, Mamadou Tandja. Rassemblés devant le Parlement, environ 10.000 manifestants, selon une estimation d´un journaliste de l´AFP, ont répondu à l´appel lancé la veille par la Coordination des forces démocratiques pour la République (Cfdr). Cette coalition qui rassemble, outre des partis politiques, des organisations de défense des droits de l´homme et des syndicats, s´était depuis des mois vivement opposée aux initiatives de M.Tandja pour rester au pouvoir coûte que coûte. «C´est une manifestation de soutien au coup d´Etat, c´est le renversement de la dictature Tandja que nous célébrons», a déclaré Soumana Sanda, un ancien député présent dan la foule. «Merci de nous avoir délivrés de la dictature!» lançait une manifestante à des soldats. Jeudi, un «Conseil suprême pour la restauration de la démocratie» (Csrd, junte) a déposé M.Tandja à l´issue de combats autour du Palais présidentiel, qui ont fait au moins trois morts. La junte, qui a dissous le gouvernement et suspendu la Constitution adoptée en août 2009 dans un climat de vive controverse, a assuré vendredi avoir le contrôle de la situation et annoncé la création prochaine d´un «conseil consultatif» pour travailler à l´avenir du pays. Elle ne s´est pas encore prononcée quant à la tenue d´élections, réclamées par la communauté internationale.
Le porte-parole du Csrd, Goukoye Abdoulkarim, a assuré que le président déchu se trouvait «dans de très bonnes conditions» et était «régulièrement suivi par son médecin». Il n´a pas précisé combien de temps serait retenu M.Tandja ni les projets le concernant. Le vaste pays sahélien est plongé dans une grave crise politique depuis que M.Tandja, 71 ans, dont le dernier quinquennat s´achevait normalement en décembre, avait décidé de se maintenir au pouvoir à tout prix, faisant adopter en août une nouvelle Constitution prolongeant son mandat. Il n´avait pas hésité à dissoudre le Parlement et la Cour constitutionnelle pour arriver à ses fins et s´était attiré les critiques de la communauté internationale. La Communauté économique des Etats d´Afrique de l´Ouest (Cédéao) avait suspendu le pays et l´Union européenne interrompu son aide au développement. La communauté internationale a néanmoins, condamné le coup d´Etat et réclamé un retour rapide à des règles démocratiques. Le secrétaire général de l´ONU, Ban Ki-moon, a ainsi appelé au respect de l´Etat de droit et des droits de l´homme, emboîtant le pas à la France, l´UE ou encore l´Afrique du Sud. L´Union africaine a suspendu le Niger vendredi et demandé le retour à la situation constitutionnelle d´avant août 2009. Dès vendredi, le parti de M.Tandja, le Mnsd, a reconnu la prise de pouvoir de la junte et d´autres dirigeants politiques ont dit espérer que l´éviction du président déboucherait rapidement sur une démocratisation. Le Niger est un des Etats les plus pauvres du monde, mais c´est aussi le troisième producteur mondial d´uranium.
La France a des intérêts importants dans le pays, notamment dans l´extraction de l´uranium et compte quelque 1500 ressortissants au Niger. Le secrétaire d´Etat français à la Coopération Alain Joyandet a estimé vendredi qu´il n´y avait «aucune raison de craindre» une remise en cause du partenariat entre l´Etat nigérien et le groupe nucléaire Areva.